Le Canada profitera du resserrement prévu des normes bancaires internationales. Sur une longue période, la réforme envisagée apportera 200 milliards de dollars à l'économie canadienne, ce qui correspond à 13% du produit intérieur brut (PIB) actuel.

C'est ce qui ressort d'une étude dévoilée hier par la Banque du Canada qui soutient les efforts du Comité de Bâle. Après la crise du crédit, le G20 a mandaté ce comité, formé des banquiers centraux et des instances réglementaires de 27 pays, pour renforcer les règles de capitalisation bancaire afin d'éviter une nouvelle hécatombe.

«Cette démarche permettra d'accroître la robustesse de notre propre système bancaire et contribuera à favoriser la stabilité financière mondiale», a déclaré le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney.

À son avis, il est «nettement dans l'intérêt du Canada de collaborer avec les autres pays afin d'élaborer des normes internationales plus rigoureuses en matière de fonds propres et de liquidité.»

Réduire les crises

Le renforcement des normes bancaires permettra de réduire la fréquence et la gravité des crises financières, au Canada mais surtout à l'étranger.

«C'est rationnel pour nous de participer à un effort international. On a intérêt à obtenir la stabilisation de nos partenaires commerciaux, en particulier des États-Unis, car cela aura un impact positif sur notre économie», a commenté Jean Roy, professeur de finances à HEC Montréal.

Selon la Banque du Canada, une augmentation de deux points de pourcentage des ratios de fonds propres des banques donnerait lieu à une hausse annuelle de 1,1% du niveau du PIB du Canada.

Les bénéfices de la réforme bancaire internationale surpassent largement les coûts d'implantation au Canada, considère la Banque du Canada.

Pour faire face aux exigences plus rigoureuses, les banques canadiennes augmenteront certainement les taux d'intérêt sur les prêts qu'elles accordent. En fait, leur marge d'intermédiation pourrait s'élargir de 0,42%, évalue la Banque du Canada. Cette marge reflète l'écart de taux d'intérêt sur les prêts et sur les dépôts. Cela rabaissera de 0,3% la croissance du PIB par rapport à sa trajectoire tendancielle.

Mais en considérant les bénéfices et les coûts, l'implantation de la réforme bancaire donnera lieu à une hausse annuelle de 0,8% du PIB, par rapport à sa croissance tendancielle, évalue la Banque du Canada.

Négociation

L'étude fait contrepoids aux récriminations des banques qui estiment que les nouvelles exigences de «Bâle III» risquent de freiner la croissance économique, au moment même où plusieurs pays entreprennent des mesures d'austérité.

Le Comité a déjà assoupli sa proposition le mois dernier. Il doit finaliser le projet d'ici novembre prochain. Tandis que le projet européen de taxe bancaire n'a pas fait consensus sur la scène mondiale, la proposition du Comité de Bâle devrait être adoptée, considère M. Roy.

En relevant les ratios de capitalisation, on veut «prévenir plutôt que guérir» comme on l'aurait fait la taxe, en accumulant des montants nécessaires pour rescaper des banques en mauvaise posture.

En forçant les banques à garder davantage de fonds propres, on s'assure qu'elles auront un meilleur coussin pour absorber les chocs. Mais ce n'est pas tout. «Quand elles ont une capitalisation plus élevée, les banques ont plus à perdre, donc elles sont plus prudentes. Cela induit un comportement plus sain», ajoute M. Roy.

Il reste à déterminer combien de temps les banques auront pour s'adapter. Les banques auront certainement plus que deux ans, comme on l'envisageait au départ. Une période de transition aussi courte entrainerait des coûts plus élevés, a confirmé l'étude de la Banque du Canada.

Les banques seraient forcées de se ruer toutes en même temps pour puiser des capitaux dans le marché, quitte à obtenir des conditions désavantageuses, ou encore elles devraient fermer le robinet du crédit.

Avec une période de transition de quatre ans, les coûts sont plus raisonnables. Il serait aussi possible d'imposer une échelle graduelle de recapitalisation, dit M. Roy, en traçant «un sentier de croissance du capital».

5%

Sous l'effet de la récente crise financière, la production dans les pays du G7 a reculé de presque 5%, entraînant un manque à gagner de 2000 milliards de dollars et la suppression de millions de postes

dans le monde.

-8,6%

Une hausse de 2% du ratio de capitalisation des banques, qui vise à prévenir de futures crises, entraînera une baisse de 8,6% à court terme de la croissance économique canadienne, selon la Banque du Canada.

+200 milliards

À long terme, le resserrement des normes de capitalisation serait bénéfique, gonflant la croissance de 21,6% ou de 200 milliards de dollars.