Dans son prochain budget, le gouvernement Legault doit impérativement réinvestir dans les services publics, sinon « ça risque de péter », parce que les travailleurs tiennent les réseaux à bout de bras depuis trop longtemps et ils sont épuisés, estime le président de la FTQ, Daniel Boyer.

Au cours d'une entrevue avec La Presse canadienne, mardi, à deux semaines du premier budget du gouvernement Legault, M. Boyer a lancé un appel, au nom des milliers de travailleurs qui ont subi les répercussions des restrictions budgétaires, notamment en santé et en éducation, au cours des dernières années.

« Il faut redonner de l'air à ces grands réseaux-là. Ces réseaux-là sont mis à mal. Ça risque de péter un moment donné. Je vous le dis, en santé notamment, mais en éducation aussi : (il y a) des hommes, des femmes, surtout des femmes, qui tiennent à bout de bras ces réseaux-là depuis déjà trop longtemps et ils ont besoin d'air », a rapporté le président de la plus grande centrale syndicale du Québec.

Plusieurs reportages ont fait état de l'épuisement des infirmières, des préposés aux bénéficiaires, des enseignants, des professionnels de l'éducation.

« Oui, il faut ajouter des bras, il faut ajouter des sous. Il faut surtout donner à ces gens-là, qui rendent service à la population [...] des conditions d'exercice d'emploi qui vont être attrayantes et qui vont leur permettre de s'épanouir au travail, dans le but, justement, que ça se reflète sur la qualité des services qui sont donnés. Donc, il faut réinvestir dans nos services publics », a-t-il plaidé.

Le président de la centrale de plus de 600 000 membres estime qu'avec un surplus de 3,4 à 4,6 milliards, selon l'Institut du Québec, le gouvernement Legault a les moyens d'agir.

Salaire minimum

Le président de la FTQ note également qu'une augmentation du salaire minimum au-delà des 12,50 $ déjà annoncés pour le 1er mai 2019 serait bienvenue, d'autant plus que plusieurs entreprises peinent à recruter des travailleurs.

« Il faut mettre la pédale sur l'accélérateur » et le budget serait l'occasion d'envoyer un signal à cet effet, croit le président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.

« On se fie toujours sur un pourcentage du salaire moyen pour établir le salaire minimum. Mais qu'est-ce que vient faire le salaire moyen quand on a à déterminer un salaire juste, raisonnable pour permettre au monde de vivre dignement et décemment en 2019 au Québec ? » demande M. Boyer.

Allègements fiscaux

Bien que la Coalition avenir Québec, en campagne électorale, se soit engagée à redonner de l'argent aux contribuables, M. Boyer l'invite à y songer deux fois avant de multiplier les allègements fiscaux.

« J'invite ce gouvernement-là à être prudent sur les allègements fiscaux, parce qu'ils sont bien souvent récurrents. Donc, ce sont des sous dont on se prive année après année », a insisté M. Boyer.

Pénurie de main-d'oeuvre

Alors que la rareté de main-d'oeuvre persiste dans bien des industries, le président de la FTQ juge qu'il faudra des solutions à court, moyen et long termes.

« On a de grandes inquiétudes. On diminue les seuils d'immigration permanente, mais, en même temps, on va accueillir plus de travailleurs étrangers temporaires. Oui on veut pallier à la rareté, à la pénurie de main-d'oeuvre, mais notre inquiétude avec les travailleurs étrangers temporaires, c'est qu'on ne veut pas que ça devienne des travailleurs de seconde zone, avec moins de droits », a plaidé M. Boyer.

« Il y a les personnes immigrantes déjà installées ici au Québec auxquelles on devrait donner des conditions favorables pour qu'elles se trouvent un emploi. Il y a aussi des personnes handicapées, des Autochtones, des personnes assistées sociales et des personnes plus âgées qui sont à la retraite. Il faut créer des conditions dans le but d'attirer et de maintenir ces gens-là au travail », a ajouté M. Boyer.