Une entente de principe intervenue le 29 juin entre l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) et le ministre de la Santé et des Services sociaux abolirait le plafond qui limite présentement à 15 % les ristournes que versent les fabricants de médicaments génériques aux pharmaciens. Cette abolition diminuerait la rentabilité de Pro Doc, la filiale du Groupe Jean Coutu qui fabrique des médicaments génériques.

« Si l'entente est adoptée telle quelle, elle sera favorable aux pharmaciens propriétaires, mais elle nuira aux résultats consolidés du Groupe Jean Coutu », a déclaré le président et chef de la direction du Groupe Jean Coutu, François-Jean Coutu, à l'occasion de l'assemblée annuelle de l'entreprise hier à Longueuil.

C'est en 2007 que le ministre de la Santé et des Services sociaux, Philippe Couillard, avait annoncé la mise en place d'un plafond pour limiter les ristournes (« allocations professionnelles ») accordées par les fabricants de médicaments génériques aux pharmaciens. L'AQPP avait alors dénoncé ce plafond, affirmant qu'il allait fragiliser certaines pharmacies qui comptaient sur ces ristournes pour assumer des dépenses courantes.

En avril dernier, le gouvernement libéral de Philippe Couillard a fait adopter le projet de loi 28, qui prévoit une diminution de 400 millions des honoraires des pharmaciens sur trois ans, soit 133 millions par an.

L'entente intervenue la semaine dernière au sujet de l'abolition du plafond de 15 % sur les ristournes devrait permettre aux pharmaciens de compenser au moins en partie la diminution des honoraires versés par le gouvernement.

Une fois le plafond éliminé, il se pourrait que les fabricants de médicaments génériques offrent des ristournes plus intéressantes les unes que les autres pour gagner la faveur des pharmaciens. Pro Doc devra jouer le jeu.

« On va essayer de rester concurrentiels », a déclaré François-Jean Coutu.

Ce dernier ne comprend pas pourquoi l'Ordre des pharmaciens ne se prononce pas dans ce dossier.

Les médicaments génériques, moins chers que les médicaments d'origine, sont de plus en plus prescrits. Au premier trimestre (terminé le 30 mai), ils ont représenté 69,1 % des ordonnances au Groupe Jean Coutu, comparativement à 67,8 % au premier trimestre de l'exercice précédent.

L'entreprise estime que l'introduction de nouveaux médicaments génériques a réduit la croissance des ventes au détail de sa section pharmaceutique de 1,1 % au premier trimestre. Les réductions de prix des médicaments génériques ont réduit les croissances de ces ventes d'un autre 0,4 %.

DEMANDE À LA COUR SUPRÊME

Par ailleurs, Jean Coutu a inscrit une provision fiscale de 4,7 millions au premier trimestre, à la suite d'un jugement défavorable rendu par la Cour d'appel du Québec dans un dossier fiscal.

Le conflit porte sur des transactions effectuées au milieu des années 2000 entre l'entreprise et sa filiale américaine. L'Agence du revenu du Canada a soutenu que Jean Coutu aurait dû payer des impôts supplémentaires de 2,2 millions de dollars pour trois années en lien avec ces transactions, ce que conteste l'entreprise. Celle-ci a déposé une demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême du Canada le 29 juin dernier.

TROIS PROPOSITIONS VIVEMENT REJETÉES

Au cours de l'assemblée d'hier, les actionnaires du Groupe Jean Coutu ne se sont pas montrés tendres à l'endroit de trois propositions soumises par le Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires (MEDAC). La première, qui demandait davantage d'information sur les compétences des administrateurs, a été rejetée par 97,8 % des votants. La deuxième, qui portait sur l'équité entre la rémunération des hauts dirigeants et l'ensemble des employés, a été rejetée par 99,7 % des votants. La troisième proposition, qui demandait la nomination d'un certain nombre d'administrateurs ayant une expertise en responsabilité sociale et en environnement, a été rejetée à 99,5 %.

« En ce qui concerne les compétences de nos administrateurs, c'est un peu humiliant, a grondé Jean Coutu. En ce qui concerne les compétences de nos administrateurs en responsabilité sociale, c'est doublement humiliant. »

De son côté, le marché n'a pas été tendre envers le titre du Groupe Jean Coutu : l'action a dégringolé de 5 % pour clôturer à 21,17 $ à la Bourse de Toronto hier.

CHEZ JEAN COUTU, ON TROUVE DE TOUT... MÊME DES TRAVAILLEURS ÉTRANGERS

Plusieurs dizaines de chômeurs ont manifesté devant le siège social du Groupe Jean Coutu, mardi, pour protester contre l'utilisation de travailleurs autrichiens au nouveau centre de distribution de l'entreprise à Varennes.

Sur la pancarte d'un manifestant, on pouvait lire : « Chez Jean Coutu, on trouve de tout... même des travailleurs étrangers ».

« J'ai 80 mécaniciens industriels dans la région, a lancé Claude Gagnon, gérant d'affaires de la section locale 2182 du Conseil provincial international de la construction. Nous avons l'expertise, la compétence. »

Le vice-président aux finances du Groupe Jean Coutu, André Belzile, a expliqué que le fournisseur autrichien Knapp avait tenu à utiliser une douzaine de ses employés, spécialement formés, pour l'installation d'un système particulier de convoyage.

Le président du conseil d'administration du Groupe Jean Coutu, Jean Coutu, a souligné que la construction du centre de distribution et du nouveau siège social de l'entreprise avait donné du travail à plus de 150 travailleurs québécois.