L'entente renégociée entre Québec et la société Stornoway Diamond constitue un exemple concret de la nouvelle approche du gouvernement à l'égard de la réalisation d'infrastructures pour les mines, selon la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet.

À la suite d'une renégociation entre les deux parties, Québec réduit son investissement dans la route des monts Otish, premier projet d'infrastructure du Plan Nord, tandis que Stornoway, qui développe une mine de diamants, voit sa contribution passer de 44 à 77 millions.

«Le signal qu'on envoie aux compagnies minières, c'est: «Nous autres, on est prêts à s'entendre avec vous, mais il faut que les termes soient raisonnables pour les contribuables du Québec»», a ajouté la ministre Martine Ouellet.

À l'origine, le gouvernement avait pris à sa charge l'ensemble de la construction de la route de 243 kilomètres, qui prolonge la route 167 du lac Mistassini jusqu'au projet Renard, de Stornoway. La société minière devait payer 44 millions, tandis que le reste de la facture revenait au gouvernement, qui payait aussi les dépassements de coûts. Et ils sont majeurs. De 2009 à 2012, le coût est passé de 260 à 472 millions de dollars.

Quatre tronçons

«Ça n'avait pas de bon sens», a lancé hier le ministre des Finances, Nicolas Marceau, en conférence de presse. Le gouvernement libéral avait selon lui signé une «mauvaise entente» à l'été 2011.

La route des monts Otish se divise en quatre tronçons. Le ministère des Transports gère actuellement la construction d'une route gravelée à deux voies (limite de vitesse de 70 km/h) sur les deux premiers tronçons.

Ce devait être aussi le cas sur les deux autres tronçons (97 kilomètres), mais selon la nouvelle entente, la route se transformera en chemin minier, dont la construction et les coûts seront à la charge de Stornoway. Ce chemin minier sera de moindre qualité: il n'aura qu'une seule voie, la vitesse sera limitée à 50 km/h, et sa durée de vie sera moindre.

Québec plafonne ainsi son investissement à 304 millions pour les deux premiers tronçons. Les contribuables épargneront donc au moins 124 millions, s'est félicité M. Marceau.

Selon Québec, l'entente est également avantageuse pour Stornoway, qui pourra mieux planifier le développement de sa mine, qui doit entrer en production en 2016.

Payé par Stornoway, financé par Québec

Stornoway soutient néanmoins que l'entente n'a «pas été facile à accepter», mais que la situation commandait un tel accord.

«Certains diront qu'on paie plus pour avoir moins, observe le vice-président et chef des opérations de Stornoway, Patrick Godin, dans un entretien téléphonique avec La Presse Affaires. Mais l'accès routier était primordial et va répondre à nos besoins.»

Cette nouvelle entente permettra d'éviter les délais anticipés dans la construction de la route. Le gouvernement avait suspendu l'attribution des contrats pour les deux derniers tronçons en raison des importants dépassements de coûts.

Stornoway tient à amorcer la construction de la mine dès l'automne prochain, afin d'éviter un délai d'au moins un an dans le développement du projet. Et pour cela, il lui faut un accès routier.

Québec financera Stornoway pour la portion de la route à la charge de l'entreprise, grâce à ligne de crédit non remboursable de 77 millions sur 15 ans, à un taux d'intérêt annuel de 3,35%.

L'entreprise pourra aussi compter sur une seconde ligne de crédit de 7,7 millions à un taux de 6,3%, en cas de dépassement de coût. L'entente précédente prévoyait un financement de 44 millions sur 10 ans, à un taux de 6,3%.

Encore trop risqué?

L'organisme Nature Québec, membre de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine, avait demandé au gouvernement de renégocier l'entente originale avec Stornoway, jugeant que l'État risquait trop.

«Nous avons encore un malaise, a indiqué le porte-parole de la Coalition, Ugo Lapointe. Cette nouvelle entente représente une amélioration et corrige les erreurs d'improvisation de l'ancien gouvernement. Mais le gouvernement assume encore 80% des coûts de l'ensemble de la route. Et en quoi cette entente protège-t-elle les contribuables si le projet fait faillite, compte tenu du prêt non garanti de Québec à Stornoway?» Selon la Coalition, cette entente ne doit pas être le modèle pour les autres partenariats entre l'État et les sociétés minières.

Stornoway est en pleine période de financement pour sa mine de diamants, qui nécessitera un investissement initial de 800 millions. Selon l'étude de faisabilité, la durée de vie prévue de la mine est de 11 ans. Mais Stornoway affirme compter sur les ressources minérales nécessaires pour exploiter Renard pendant 20 ans.

Investissement Québec détient environ le tiers des actions de Stornoway (25% des actions ordinaires et 8,7% en actions convertibles). L'action de Stornoway [[|ticker sym='T.SWY'|]] est restée stable jeudi à Toronto, à 0,50$.