Après s'être complètement restructuré, le système de financement des sciences de la vie au Québec vient de larguer sa première bombe: un investissement majeur de 35 millions dans la boîte montréalaise Thrasos.

La transaction permettra à la petite société de pousser le développement de son traitement expérimental contre l'insuffisance rénale aiguë, un marché complètement vierge qui fait saliver les investisseurs. Mais elle est aussi brandie par les financiers comme le premier exemple d'un «nouveau modèle» qui pourrait relancer le secteur.

Thrasos annoncera aujourd'hui avoir raflé 35 millions d'un vaste groupe d'investisseurs qui compte à la fois de grandes multinationales pharmaceutiques et des fonds locaux et étrangers.

Neuf employés

«Nous sommes très heureux d'avoir réuni un tel consortium. Il est important pour nous à ce stade de faire les choses correctement, et leur soutien sera précieux», s'est réjoui Richard Andrews, président et chef de la direction de Thrasos.

La boîte de neuf employés croit avoir trouvé une façon de traiter l'insuffisance rénale aiguë, une défaillance des reins pour laquelle il n'existe aucun traitement. L'affaire en est encore au stade expérimental, mais les premiers tests sur les animaux et les humains ont soulevé l'intérêt des investisseurs. L'argent récolé permettra de tester le traitement sur des cohortes de patients pour la première fois (études de phase II).

Outre les sommes impliquées pour une entreprise à ce stade de développement, c'est surtout la nature des investisseurs qui soulève ici l'intérêt.

Les fameux partenariats entre les grandes pharmaceutiques et les petites biotechs dont on parle depuis longtemps se concrétisent ici. L'investisseur principal est SR One, le bras de capital-risque de la multinationale pharmaceutique GlaxoSmithKline.

Biosciences Merck Lumira

La transaction marque aussi le premier investissement du fonds Biosciences Merck Lumira, un nouveau joueur québécois annoncé en grande pompe au printemps dernier. Mis sur pied à l'initiative de Teralys, un réservoir de capital-risque lancé par Investissement Québec, la Caisse de dépôt et le Fonds de solidarité FTQ, le fonds est notamment soutenu par le géant Merck.

Des fonds québécois (Fonds de solidarité FTQ), canadiens (SW Co) et américains (Advanced Technology, MP Healthcare, Pappas Ventures) complètent le groupe d'investisseurs.

«Ce financement majeur illustre directement l'impact des nouveaux fonds financés par Teralys. Il amène la participation de partenaires stratégiques et montre l'accès aux réseaux d'affaires internationaux que ça ouvre», s'est réjoui Jacques Bernier, associé principal de Teralys.

Fait intéressant, Thrasos avait été fondée à Boston avant de déménager à Montréal en 2009 parce que certains de ses investisseurs étaient canadiens.

Les grandes pharmas

Selon le docteur Jens Eckstein, président de SR One, il faut s'attendre à voir les grandes pharmaceutiques réaliser de plus en plus d'investissements de ce type.

«Ce n'est pas fait dans l'intérêt d'une pharma en particulier, mais bien pour relancer l'industrie. Il faut remplir les pipelines de nouveaux médicaments», a-t-il dit.

La Presse Affaires a par ailleurs appris que l'autre fonds mis sur pied cette année par Teralys, TVM Sciences de la vie, est maintenant prêt à sauter dans la mêlée. Outre TVM, un investisseur allemand qui a ouvert un bureau à Montréal, le fonds a aussi amené dans la métropole une équipe de Chorus, un bras de la multinationale Eli Lilly. Chorus a un modèle unique de jouer les chefs d'orchestre et de conscrire des employés et des institutions autour d'un projet pour le faire avancer.

«La rapidité avec laquelle Chorus a implanté ses opérations à Montréal dépasse nos attentes», a dit Hubert Birner, associé chez TVM et pilote du nouveau fonds.