La firme d'entretien ménager PR Maintenance est au bord de la faillite parce que son propriétaire, Pierre Robitaille, a puisé 1,9 million de dollars dans les coffres de son entreprise pour rénover son chalet.

C'est ce qu'indique la juge Guylaine Beaugé dans un jugement rendu lundi en Cour supérieure. Le jugement s'inscrivait dans le contexte d'une entente entre les créanciers de PR Maintenance pour restructurer sa dette.

PR Maintenance compte plusieurs entreprises publiques parmi ses clients, notamment la Société des alcools du Québec (SAQ), l'Université de Sherbrooke et des entités du gouvernement fédéral. L'an dernier, elle a déclaré un chiffre d'affaires de près de 100 millions et disait compter 3000 employés. Il s'agit essentiellement de travailleurs autonomes.

La décision de la juge Beaugé a pour effet de faire échouer l'entente qu'avait conclue PR avec ses créanciers pour éviter de se placer sous la protection de la loi sur la faillite.

Des millions en fonds publics

Globalement, les dettes de l'organisation s'élèvent à 17,9 millions, selon le jugement. Parmi les créanciers se trouvent la Banque Nationale et deux fonds d'interventions économiques régionaux (FIER), à qui PR doit 2,5 millions. Les FIER sont financés aux deux tiers par le gouvernement du Québec. La Caisse de dépôt et placement ainsi que la Banque de développement du Canada (BDC) sont également créanciers d'une somme de 2,8 millions par l'entremise du Fonds Alterinvest II.

Selon nos sources, le somptueux chalet de M. Robitaille se trouve au bord du lac Saint-Joseph, près de Québec. Il l'a payé 2,9 millions en avril 2010 et y a investi une fortune en rénovations.

En vertu de l'entente avec les créanciers, les FIER, la Caisse de dépôt et la BDC se voyaient rembourser de 40 à 50% de leurs prêts en plusieurs mois. La Banque Nationale pouvait espérer récupérer l'ensemble de sa créance, estimée à 6 millions. Il était également prévu que les employés recevraient 100% de ce qui leur était dû.

Ce sont deux hommes d'affaires bien connus qui ont fait basculer l'entente, soit Robert Brown, président de CAE, et Chahram Bolouri, ex-président, exploitation mondiale, de Nortel. Les deux hommes avaient aussi investi dans PR, mais par l'entremise de la Corporation financière CPVC, dont ils sont actionnaires. Or, MM. Bolouri et Brown refusent d'entériner l'entente, ce qui l'a fait chavirer.

Investissement Québec exige que PR rembourse aujourd'hui même, 28 septembre, la totalité de sa dette de 2,5 millions. La firme comptable RSM Richter a été embauchée pour faire la lumière sur la gestion du FIER par Alain Lambert. «Dès qu'on a su que des fonds avaient servi à rénover le chalet, on a demandé des comptes», a expliqué la porte-parole, Josée Corbeil.

L'affaire BCIA

PR a fait les manchettes en 2010 dans la foulée de l'affaire BCIA, agence de sécurité de Luigi Coretti. PR avait offert de racheter l'agence, mais la transaction a avorté et BCIA a déclaré faillite. PR comptait alors dans son équipe l'ancien président du Parti libéral fédéral, Benoit Corbeil, l'un des acteurs du scandale des commandites, condamné au criminel pour fraude. PR avait obtenu plusieurs contrats gouvernementaux après l'embauche de Benoit Corbeil, en 2005.