Signe que tout ne tourne pas rond dans l'industrie des résidences pour personnes âgées, la résidence Monaco dans l'arrondissement de Saint-Laurent a annoncé mardi qu'elle cessait définitivement ses activités le 22 juin. Quelque 65 travailleurs perdent leur emploi et 125 résidants, âgés de 84 ans en moyenne, doivent se trouver un nouveau domicile au cours des prochains jours.

«À ma connaissance, c'est la première fermeture du genre de la part d'un acteur aussi important dans l'industrie», a commenté un spécialiste du secteur sous le couvert de l'anonymat. Ces dernières années, deux exploitants d'envergure, Masterpiece et Melior, ont fait faillite, mais leurs résidences ont continué leurs activités sans interruption.

La résidence Monaco, au coin des boulevards Alexis-Nihon et Thimens, appartient au Fonds Maestro, détenu principalement par la Caisse de dépôt et placement du Québec. Le gestionnaire des résidences est Allegro. Le groupe Maestro possède 22 résidences et 6000 logements au Québec. Pas plus tard qu'en janvier, Maestro se portait acquéreur d'une résidence de 266 logements à Lachine au coût de 30,8 millions de dollars.

Mais, semble-t-il, l'argent de la Caisse de dépôt n'aurait pas suffi à sauver la propriété construite en 1988 qui vivait mal la concurrence des résidences plus récentes.

«Dans les trois dernières années, on a perdu environ 3 millions de dollars, dit Sébastien Barrette, directeur général adjoint, en poste depuis septembre 2010. Pour rendre la résidence au goût du jour, on parle de plusieurs millions encore. Le marché de Saint-Laurent a ses particularités. Plus de 600 logements se sont construits dans les dernières années. Même si on investit de l'argent, on ne serait pas en mesure de remplir nos logements étant donnée la surabondance de l'offre.»

L'immeuble de 267 logements est rempli à moitié seulement et le taux d'occupation baissera à 47% à la fin du mois, indique le gestionnaire du Monaco.

Forcés de déménager

La nouvelle de la fermeture de l'établissement a de quoi énerver ses 125 résidents, dont une vingtaine d'entre eux nécessitent des soins plus poussés.

Le gestionnaire, les Résidences Allegro, s'en dit bien conscient. Il les a rencontrés un à un le 10 mai pour leur expliquer la situation. Il leur versera une indemnité de trois mois de loyer. Il a aussi mandaté une firme externe pour les aider à se trouver une nouvelle place en résidence. Il assumera les frais de déménagement des résidents, incluant la mise en boîte et la mise en place des articles dans le nouveau logement. De l'aide psychologique est offerte aux résidents les plus fragiles.

La fermeture n'aurait rien à voir avec les problèmes de relations de travail, assure M. Barrette, 37 ans. Les employés syndiqués Teamsters sont en grève depuis le 2 février. Ils assurent les services essentiels. Le porte-parole syndical, Stéphane Lacroix, ne nous a pas rappelés. Une firme externe aidera les employés à se trouver un nouveau travail.

Selon le courtier Richard Perreault, la fermeture du Monaco était prévisible. «Il y a trop de résidences à Saint-Laurent. Les propriétaires du Monaco avaient essayé de vendre la propriété il y a deux ou trois ans, mais ça n'avait pas fonctionné», dit ce spécialiste de la vente de résidences spécialisées.

15% d'inoccupation

Selon la Société canadienne d'hypothèques et de logement, le taux d'inoccupation s'élève à 15% dans les résidences spécialisées du secteur Ouest-de-l'Île de Montréal.

«Des résidences qui vont fermer, on s'entend qu'il y en aura quelques-unes», dit M. Perreault. Il vient de conclure la vente de la résidence Dickson (40 logements), dans Rosemont, à un tiers qui la transformera en locatif traditionnel ou en condominiums. Le même sort attend d'autres résidences, d'après lui.

Les gestionnaires de résidences spécialisées sont sous pression, soutient Yves Desjardins, PDG du Regroupement des résidences pour aînés (RQRA). La certification des résidences et les hausses du salaire minimum contribuent à l'inflation des dépenses, à un moment où les revenus diminuent en raison du nombre des logements inoccupés.