L'industrie de la publicité fourbit ses armes en vue d'une bataille juridique contre le Plateau-Mont-Royal. Un regroupement de trois afficheurs a envoyé une mise en demeure à l'arrondissement, menaçant de le poursuivre s'il persiste à bannir les panneaux-réclame de son territoire.

Au début de septembre, l'arrondissement a annoncé son intention d'interdire les affiches publicitaires. Son conseil, dont tous les membres sont du parti Projet Montréal, a adopté un règlement qui sera avalisé en troisième lecture lundi prochain. Dès lors, les entreprises qui exploitent les panneaux auront un an pour les démanteler.

On compte 45 panneaux-réclame sur le territoire du Plateau. Les affiches appartiennent à trois entreprises, CBS, Astral et Pattison, qui n'ont manifestement pas l'intention de se laisser mettre à la porte.

«On a toujours été assez clairs dans nos représentations auprès du Plateau-Mont-Royal, indique Jeannot Lefebvre, porte-parole du Regroupement de l'industrie de l'affichage extérieur du Québec, qui rassemble les entreprises. C'est entendu qu'on va se battre et, si on doit aller jusqu'au bout, on va demander aux tribunaux de trancher et de faire respecter nos droits.»

Le Regroupement soulève trois arguments pour convaincre l'arrondissement de faire marche arrière. Il souligne d'abord que les lois et la Charte de la Ville de Montréal ne permettent pas explicitement à un arrondissement de bannir les panneaux-réclame.

Il affirme aussi que la mesure est une forme d'expropriation déguisée. Enfin, il estime que le règlement constituerait une atteinte à la liberté d'expression de ses membres.

«C'est bien évident que, dans un premier temps, on s'adresse à l'arrondissement et on essaie de lui faire comprendre qu'ils n'ont rien à gagner, affirme M. Lefebvre. Tout ce qu'ils font, c'est qu'ils menacent des emplois, ils menacent une industrie.»

Les entreprises ne s'en cachent pas, elles craignent que la décision du Plateau-Mont-Royal fasse boule de neige et que d'autres villes et arrondissements interdisent l'affichage à leur tour. Les élus de l'arrondissement n'ont d'ailleurs jamais caché leur désir de voir d'autres municipalités les imiter.

Les menaces de l'industrie de l'affichage n'impressionnent guère l'administration du maire Luc Ferrandez. Le conseiller Alex Norris, qui est responsable du dossier, affirme que la démarche de l'arrondissement est parfaitement légale.

«Le service du contentieux de la Ville de Montréal a examiné tous les arguments et les a trouvés sans fondement, a-t-il affirmé. Alors, on va de l'avant. La légitimité de notre démarche est tout à fait confirmée.»

Ce n'est pas la première fois que les entreprises publicitaires utilisent les tribunaux pour empêcher des municipalités d'interdire les panneaux-réclame. Lorsqu'elle a modifié son règlement d'urbanisme, la Ville de Québec a voulu interdire les affiches de grand format. L'industrie a contesté le projet devant la Commission municipale du Québec, qui leur a finalement donné raison. La capitale a donc renoncé à son projet, au début de 2009.

M. Norris se dit convaincu que la population appuiera le projet de son administration. D'ailleurs, souligne-t-il, des citoyens avaient la possibilité de forcer la tenue d'un référendum sur le règlement, mais personne n'a signé le registre qui était ouvert au bureau d'arrondissement jusqu'à mardi.

«Est-ce que c'est vraiment dans leur intérêt d'en faire un combat juridique et d'en faire un débat public? Nous croyons que non, affirme le conseiller. Nous sommes tout à fait prêts à faire ce débat et nous croyons que nous allons le gagner.»

Les afficheurs ne sont pas seuls à menacer le Plateau de poursuites. Le propriétaire d'un immeuble a aussi envoyé une mise en demeure à l'arrondissement, puisqu'il craint que le nouveau règlement fasse diminuer la valeur de son immeuble.