Oubliez les mannequins filiformes, les flashs d'appareils photo et les soirées mondaines arrosées de champagne. La Semaine de mode de Montréal, c'est avant tout une affaire de billets verts.

Durant trois jours cette semaine, le marché Bonsecours se transforme en immense salle de vente pour 80 designers québécois. Ceux dont la réputation n'est plus à faire comme ceux qui veulent se faire un nom à l'échelle internationale. Tous ont le même objectif: séduire la presse spécialisée et surtout les acheteurs des grands magasins de vêtements de la planète. Sur les 250 acheteurs présents à Montréal, une quarantaine provient de l'extérieur du Canada.

«Il y a des acheteurs de partout dans le monde qui sont à Montréal cette semaine alors on veut que ça résonne dans le tiroir-caisse, dit Chantal Durivage, coprésidente de la Semaine de mode de Montréal. La mode, c'est un circuit fermé comme la F1. Montréal s'est taillé une place importante au fil des ans. Pas une place de premier plan comme Milan ou Paris, mais nous nous comparons à Berlin et Barcelone, deux autres villes très créatrices.»

Contrairement aux grands rendez-vous de la mode comme Paris et Milan, les acheteurs ont l'occasion d'acheter les créations locales sur-le-champ. Plusieurs salles de montre ont été aménagées sur place, à quelques pas des défilés. En France ou en Italie, les acheteurs doivent attendre quelques jours après la fin des défilés afin d'avoir accès aux salles de montre. «Après les défilés, les acheteurs sont émotifs et ils ont tendance à acheter davantage, dit Chantal Durivage. Plus on s'éloigne du défilé, moins ils se laisseront guider par les émotions qu'ils ont ressenties à la fin du défilé. Nous avons inventé ce concept et plusieurs festivals nous ont copiés.»

Cette semaine, une trentaine de designers feront défiler leurs créations du printemps 2010. De plus, 60 designers québécois exposeront leurs créations dans les salles de montre, comparativement à 40 designers l'an dernier. Une hausse de 50%, en pleine récession par surcroît. Chantal Durivage croit que le dollar canadien, toujours bon marché face à l'euro, joue en faveur des designers québécois. «La devise canadienne est intéressante pour les acheteurs européens. Du même coup, c'est intéressant pour les acheteurs canadiens d'acheter en monnaie locale», dit la coprésidente de la Semaine de mode de Montréal, qui en est à sa 17e présentation. La première Semaine de mode, événement semestriel, a eu lieu en 2001.

Subventionné à 36%

La Semaine de mode de Montréal, qui se termine demain au marché Bonsecours dans le Vieux-Montréal, reçoit l'appui des gouvernements. Les pouvoirs publics subventionnent l'événement à hauteur de 36%.

Le gouvernement du Québec a augmenté sa contribution de 280 000$ à 325 000$ cette année. La Ville de Montréal fournit le reste du financement public, soit 40 000$. Le budget de la Semaine de mode de Montréal est d'environ un million de dollars.

L'investissement de Québec est rentable, soutient le ministre du Développement économique, Clément Gignac. «L'industrie de la mode est très importante au Québec, dit le ministre Gignac. Elle représente environ 18 000 emplois et Montréal est la troisième ville (de la mode) en Amérique du Nord après Los Angeles et New York. C'est aussi une question d'image. Il faut encourager le talent de nos créateurs.»

En 2007, le gouvernement québécois a annoncé un plan d'aide à l'industrie de la mode de 82 millions sur trois ans. Le ministre Gignac a l'intention de continuer de soutenir l'industrie de la mode après l'expiration du plan l'an prochain.

Déjà, hier, le ministre a annoncé qu'il débloquait 1,15 million pour soutenir des entreprises du secteur. Rudsak, qui fabrique des manteaux, bottes et sacs en cuir haut de gamme, s'est sauvée avec le gros du magot, raflant 950 000$ grâce à un prêt d'Investissement Québec en plus d'une aide financière de 50 000$. Harricana, qui fait des vêtements à partir de matériaux recyclés, a obtenu un prêt de 100 000$ et une aide financière de 52 000$.

 

La Semaine de mode en bref

Budget d'un million de dollars > Subventions gouvernementales de 365 000$ (Québec 325 000$, Montréal 40 000$) > 30 défilés > 80 designers > 250 acheteurs, dont une quarantaine d'acheteurs internationaux > 250 journalistes, dont une dizaine de journalistes internationaux