«Vissé maintenant selon le paneau a ajusté au extrémités des tiges du bois, présentant de trous déjà de l'outil afin de visser...»

Plusieurs d'entre nous ont déjà été confrontés à de telles instructions aussi cocasses qu'inutiles. Certains magazines et sites web s'amusent même à répertorier ces perles trouvées dans des guides d'assemblage, emballages de produits ou même listes d'ingrédients.

Certes, mieux vaut en rire qu'en pleurer. Mais qu'en est-il de l'entreprise fabriquant et mettant sur le marché ces produits? Ou plutôt qu'en est-il de la perception de cette entreprise par les consommateurs?

L'étude des perceptions est au coeur de la recherche en marketing. De simples stimuli - pensons notamment au prix, à la marque, à la publicité, à l'emballage ou au pays d'origine - peuvent affecter, consciemment ou non, les impressions des consommateurs et, par conséquent, leurs choix et leurs comportements.

L'exemple présenté en introduction demeure bien sûr un cas extrême, mais ne pourrions-nous pas penser que la qualité de la langue (orthographe, grammaire, etc.) pourrait devenir un de ces critères d'évaluation ou indicateurs de qualité? Aussi logique que cela puisse sembler, jamais cette problématique n'avait été étudiée de manière empirique, dans un contexte marketing.

Une récente recherche a révélé qu'une mauvaise qualité de la langue dans la documentation accompagnant un produit est remarquée par le consommateur et influence négativement son évaluation de cette documentation. De plus, la mauvaise qualité de la langue semble directement affecter la perception des consommateurs quant à l'entreprise. À leurs yeux, les erreurs de langue dénotent un manque de professionnalisme, de sérieux ou même de considération pour les clients.

Les effets négatifs de la mauvaise qualité de la langue sont d'autant plus importants qu'ils s'étendent même à l'évaluation que fera le consommateur du produit associé à la documentation. Par inférences, les gens sont poussés à croire que si l'entreprise n'est pas plus rigoureuse dans la rédaction et la révision de ses textes, le soin apporté à la qualité de ses produits laisse probablement à désirer également. La mauvaise qualité de la langue mine donc la confiance des consommateurs.

Bref, on a observé que plus la documentation accompagnant un produit est évaluée défavorablement, plus le produit et l'entreprise sont évalués défavorablement.

Finalement, les résultats de la recherche indiquent que l'évaluation que le consommateur fera du texte influencera ses intentions de recommandation et de rachat des produits de cette entreprise. En effet, pourquoi recommander une telle entreprise? Connaissant les effets potentiellement dévastateurs du bouche-à-oreille, notamment par l'entremise de l'internet, cette problématique ne devrait pas être prise à la légère.

Si la recherche dont il est ici question s'est principalement penchée sur les effets de la qualité de la langue dans la documentation accompagnant un produit, soit les guides d'instructions ou d'assemblage, on peut croire que ces effets seront similaires en ce qui a trait à la qualité de la langue dans toute autre forme de communication de l'entreprise, ses brochures promotionnelles ou son site web, par exemple.

Il s'agit souvent du premier contact que les consommateurs ont avec une entreprise. Or on sait que, lorsque le consommateur possède peu ou pas d'expérience avec une entreprise, il effectuera une évaluation plus heuristique, en se fiant à l'information qui lui est disponible.

Ainsi, des fautes d'orthographe ou de grammaire dans les documents promotionnels de l'entreprise généreront des inférences négatives pouvant affecter l'attitude du lecteur non seulement à l'égard du document en question, mais de toute l'entreprise.

Les conclusions de cette étude pourraient également être étendues au domaine des services professionnels, pensons notamment aux firmes de consultation. Dans ces secteurs d'activité, le rapport d'analyse et de recommandations remis aux clients à la fin d'un mandat est souvent l'un des seuls éléments tangibles sur lequel le client peut se baser pour évaluer la qualité du service rendu.

Bien sûr, la pertinence du contenu du rapport sera primordiale, mais des lacunes dans la qualité de la langue utilisée dans le document pourraient aussi venir affecter la satisfaction des clients et leurs impressions par rapport à la firme.

Dans tous les cas, les entreprises se doivent de considérer la qualité de la langue utilisée dans leurs communications comme un élément stratégique ayant la capacité d'orienter les comportements des consommateurs à leur égard. Elles devraient ainsi accorder une attention particulière à la rédaction et à la traduction de ces textes et y investir, pour s'assurer qu'ils projettent une image positive, devenant le reflet de la qualité de l'entreprise et de ses produits.

Arancha Pedraz-Delhaes est chargée de recherche chez Léger Marketing. Sylvain Sénécal, Ph.D. est professeur agrégé de marketing et titulaire de la Chaire de commerce électronique RBC Groupe Financier sylvain.senecal@hec.ca