Le mieux-être au travail prend désormais une tournure officielle. Les entreprises qui souhaitent que leur programme de santé du travail soit reconnu peuvent maintenant obtenir la certification «Entreprise en santé».

La norme avait été lancée officiellement l'an dernier par un organisme à but non lucratif, le Groupe de promotion pour la prévention en santé (GP2S). Mais avant de la rendre accessible, il fallait mettre au point un protocole d'évaluation des entreprises.

 

C'est chose faite. Depuis février, on peut se procurer la norme et un guide explicatif sur le site du Bureau de normalisation du Québec (BNQ).

Concrètement, elle reconnaîtra les actions des entreprises dans quatre sphères d'activité: les habitudes de vie du personnel, l'équilibre travail-vie personnelle, l'environnement de travail et les pratiques de gestion.

GP2S a entrepris une tournée du Québec pour mieux la faire connaître. Et son directeur général, Jean-François Lamarche, s'attend à ce que beaucoup d'entreprises se montrent intéressées.

«C'est avantageux de pouvoir se présenter comme entreprise en santé, pour attirer et garder la main-d'oeuvre dans le contexte de pénurie actuel, dit-il. D'autant plus que les jeunes générations de travailleurs attachent beaucoup d'importance aux avantages autres que le salaire.»

Rentable

Le Québec se situe devant la France, mais derrière les États-Unis et loin derrière les pays scandinaves pour les programmes de santé au travail, indique M. Lamarche.

Pourtant, chaque dollar dépensé dans un programme de santé du travail rapporte de 1,50$ à 3$ à l'entreprise, selon les études.

«Les bénéfices sont importants, dit Claudine Ducharme, consultante principale, Santé et productivité chez Watson Wyatt Worldwide. Cela diminue l'absentéisme, les coûts d'invalidité, le présentéisme et le taux de roulement. Et en plus, ça améliore la productivité et le climat de travail.»

L'objectif de GP2S est donc que toutes les entreprises québécoises aient un jour un programme de santé globale. Mais la vision de cet organisme, qui regroupe des entreprises, des fournisseurs et des associations du domaine de la santé, va plus loin. Ultimement, l'investissement dans des programmes de mieux-être rapporte non seulement aux employés et aux entreprises, mais aussi à la société.

«GP2S a été lancé par des gens d'affaires qui trouvaient que, comme société, on devrait arrêter de mettre tout notre argent dans la santé curative et qu'on devrait prévenir davantage, ajoute M. Lamarche. Or, le milieu de travail est l'endroit parfait pour éduquer les gens à la prévention.»

Pour atteindre ses objectifs, GP2S a recruté de grandes entreprises déjà reconnues pour avoir une longueur d'avance dans les programmes de mieux-être des employés. On pense, entre autres, à Desjardins, à Lassonde, à Alcoa et à Hydro-Québec, qui ont contribué à évaluer la norme et à voir si elle tenait la route dans une grande entreprise.

«Ce qui nous intéresse, c'est le fait que de plus en plus de PME auront un cadre de référence pour implanter leurs programmes de santé, dit la docteure Danielle Laurier, directrice santé et sécurité à Hydro-Québec. Ainsi, nos sous-traitants seront mieux outillés.»

De là à dire que la norme sera un jour implantée à Hydro, il est encore trop tôt. «Pour le moment, la santé a déjà une place importante pour nous, dit Mme Laurier. Il est clair que nous allons utiliser la norme comme guide pour nous évaluer et nous améliorer, mais il est trop tôt pour dire si nous allons investir financièrement dans une certification.»

Car celle-ci n'est pas gratuite. «Le prix varie selon le nombre d'employés et le nombre de sites que possède l'entreprise, dit Jean Rousseau, directeur adjoint au BNQ. Pour une petite entreprise de 10 à 20 employés, le prix de base est autour de 2800$. Cela coûte légèrement moins cher que d'implanter une norme ISO 9001.»

Pas si compliqué

Les entreprises ne devraient pas voir la nouvelle norme comme trop complexe, croit Claudine Ducharme, qui a fait partie du comité d'élaboration. Pour une entreprise qui a déjà un programme de santé et de mieux-être, la marche ne devrait pas être trop haute.

«C'est facile à implanter, mais il faut y mettre le temps et les efforts, dit-elle. Cela vaut la peine d'être accompagné par une personne qui a les compétences pour nous aider, et on doit faire attention aux ressources qui nous offriront ces services.» Bon nombre de consultants ont d'ailleurs commencé à mettre leurs connaissances à jour en ce sens, indique Mme Ducharme.

«Tous les fournisseurs de services en programmes de santé aux entreprises ont déjà ajusté leur offre pour correspondre à la norme», dit Jean-François Lamarche.