La Bourse de Shanghai a dévissé de quasiment 6% mercredi en clôture, dans un climat de panique générale en dépit de nouvelles mesures d'urgence des autorités et de la suspension des échanges sur quelque 1300 titres des marchés chinois.

L'indice composite shanghaïen a terminé sur un plongeon de 5,90%, à 3507,19 points. Il a lâché jusqu'à 8,20% en séance après une chute libre à l'ouverture.

La Bourse de Shenzhen a un peu mieux résisté, ne reculant que de 2,50% à 1884,45 points.

«C'est un véritable mouvement de panique, comme un couteau en train de tomber: je ne suggérerai à personne de l'attraper au vol», grinçait Tony Chu, gérant du fonds RS Investment Management, cité par Bloomberg News.

Les places chinoises ont abandonné plus de 30% en trois semaines, voyant s'envoler plus de 3200 milliards de dollars en valeur - selon une estimation publiée par Bloomberg-, soit une douzaine de fois le PIB de la Grèce l'an dernier.

La débâcle se poursuivait mercredi dans un climat d'affolement général, qu'aucune admonestation ou annonce du gouvernement ne parvenait à endiguer.

Et ce alors que la contagion gagnait la Bourse de Hong Kong, qui a plongé mercredi de 5,84%.

«La panique des investisseurs et ces ventes massives irrationnelles provoquent une forte pression sur la liquidité des Bourses», déplorait Deng Ge, porte-parole de la CSRC, le régulateur des marchés.

Les autorités chinoises avaient pourtant dévoilé précipitamment tout un train de nouvelles mesures, adoptées à marche forcée mais impuissantes à inverser la tendance.

Les compagnies d'assurance sont ainsi désormais autorisées à placer une proportion accrue de leurs actifs en Bourse (40% contre 30% précédemment), et peuvent investir jusqu'à 10% de leurs fonds sur un seul titre.

Pékin s'est également engagé à ouvrir des lignes de crédit de 260 milliards de yuans (43 milliards de dollars) aux maisons de courtage pour qu'elles poursuivent leurs acquisitions de titres en Bourse.

La banque centrale a elle promis dans un communiqué de soutenir le «développement stable» des marchés, en assurant un financement aux «opérations sur marge» (achats d'actions par endettement).

Enfin, une centaine de grands groupes étatiques chinois se sont vu interdire de vendre les actions de leurs filiales cotées, tandis que la CSRC enjoignait aux actionnaires possédant plus de 5% dans des entreprises cotées de conserver leur participation.

Suspension de titres en masse

Rien n'y fait: face à un climat de défiance générale, les investisseurs en quête de liquidités continuaient à vendre massivement leurs actions pour s'en procurer.

Autre facteur d'inquiétude: les échanges sont désormais interrompus sur plus de 1300 entreprises cotées, afin d'empêcher leurs titres de descendre encore plus bas. Environ 40% de la cote se trouvent donc paralysés.

«Le fait qu'une telle quantité d'entreprises soient suspendues restreint la liquidité disponible (car les titres concernés ne peuvent plus être vendus) et cela accroît les risques pour les actions qui s'échangent encore», avertissait Li Daxiao, analyste du courtier Yingda.

Du coup, «les investisseurs n'ont d'autre choix que de commencer à vendre les ''blue chips'' (valeurs vedettes jugées sûres, à forte capitalisation)», confirmait Zhang Yanbing, de Zheshang Securities. Résultat: l'indice continue de s'enfoncer.

L'arsenal de mesures coups de poing du week-end dernier n'aura donc pas convaincu.

Les 21 principales sociétés de courtage chinoises s'étaient engagées samedi à investir quelque 19 milliards de dollars dans des produits boursiers, et les régulateurs avaient promis d'arrêter les introductions en Bourse pour éviter toute perturbation supplémentaire.

Or, l'écrasante majorité des investisseurs sur les Bourses chinoises sont des particuliers, souvent suivistes et s'étant fortement endettés-via des opérations sur marge- pour investir.

Le phénomène a alimenté sur l'année passée l'envolée des marchés, mais il contribue maintenant à accélérer leurs pertes.

Même si la crise grecque n'arrange rien, la correction des places chinoises a des racines locales: la Bourse de Shanghai avait gonflé de 150% en douze mois, dopée à l'endettement et déconnectée de l'économie réelle.

De l'avis général, les autorités chinoises pourraient intervenir encore, pour éviter un imprévisible mécontentement populaire.

Pour Pékin, c'est une question de crédibilité: il s'appuyait sur les Bourses pour financer le décollage du secteur privé, approfondir ses réformes du secteur financier et ses efforts de rééquilibrage économique.