Le gouvernement grec doit donner jeudi le coup d'envoi de son nouveau plan de redressement 2012-2015 réclamé par les créanciers du pays pour poursuivre l'aide au pays, mais qui fait souffler la fronde jusque dans les rangs de la majorité socialiste.

Le programme, durci sous pression des bailleurs de fonds du pays, zone euro et Fonds monétaire international, et révisé dans ses détails jusqu'à tard dans la nuit dans une tentative de calmer la grogne doit être avalisé en conseil des ministres avant son dépôt dans la foulée au parlement, selon une source du ministère des Finances.

Ces mesures ont été présentées par le premier ministre grec, Georges Papandréou, comme la condition pour sauver le pays plombé par une dette abyssale, de près de 350 milliards d'euros, et décrocher le nouveau plan d'aide, d'un montant qui pourrait aller jusqu'à 100 milliards d'euros, dont discutent UE et FMI, pour pallier l'insolvabilité grecque.

Pour les faire endosser par ses troupes, un an seulement après la première cure d'austérité, présentée à l'époque comme suffisante, M. Papandréou a mêlé autocritique et dramatisation de l'enjeu, lors de trois réunions marathon successives tenues depuis lundi.

Alors que les médias ironisaient sur cette «thérapie de groupe», le porte-parole officiel Georges Pétalotis, s'est déclaré confiant mercredi quant aux résultats du vote prévu sur le plan, en principe autour du 28 juin, au parlement, où le gouvernement dispose de 156 sièges sur 300.

Des lois d'application doivent ensuite être votées d'ici mi-juillet, pour débloquer le versement, exceptionnellement retardé, de la cinquième tranche du premier prêt de 110 milliards d'euros consenti l'an dernier par ses créanciers.

Discuté depuis mi-avril, le plan associe une rafale de privatisations express à un durcissement de la rigueur, avec 28,4 milliards d'économies prévues, dont 6,4 milliards en mesures supplémentaires pour 2011.

Les privatisations, allant des transports à l'énergie en passant par les banques, censées rapporter 50 milliards d'ici 2015, ont mis le feu aux poudres. Les syndicats appellent à une grève générale le 15 juin contre le «bradage» du pays, et une mobilisation citoyenne hors parti et hors syndicats rameute depuis fin mai des foules grandissantes sur la place centrale d'Athènes.

Cette contestation d'un nouveau genre fragilise le système politique au moment même où il doit relever un défi majeur, estiment les analystes, pour qui le risque de dérapages a rarement été aussi fort.

Soucieux de ne pas perdre trop de terrain, les syndicats organisaient aussi jeudi une grève de 24 heures dans les sociétés privatisables, et un défilé en début d'après-midi dans les grandes villes.

Mais avec un chômage qui s'envole, à 16,2% en mars, la tension sociale et politique risque aussi de progresser avec la mise en oeuvre des mesures d'austérité, déclinant hausse de la pression fiscale, réduction des dépenses salariales et coupes dans les allocations sociales.

Dans un pays dénué de culture du consensus, le chef de l'opposition de droite, Antonis Samaras a dénoncé une recette erronée, et campé sur son refus d'épauler le gouvernement en dépit des appels pressants de sa famille politique européenne, et des dirigeants de la zone euro, à un engagement garantissant que le pays tiendrait le cap même après la fin du mandat de l'actuelle majorité, en 2013.

Selon la presse jeudi, qui anticipait sur le détail des mesures, le gouvernement aurait arbitré entre les critiques en accentuant la pression fiscale sur les classes moyennes pour ne pas l'alourdir sur les plus bas revenus et en modérant la hausse de la fiscalité immobilière.

Un nouveau plan d'aide est inévitable

Le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker a jugé jeudi inévitable un nouveau plan d'aide financière à la Grèce, dont le montant exact dépendra de la contribution exacte des banques privées qui détiennent de la dette du pays.

«Il est évident qu'il y aura un deuxième programme pour la Grèce», a-t-il déclaré à des journalistes à Luxembourg, en se félicitant que l'Allemagne se soit rangée à cet avis.

Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a plaidé pour une extension «substantielle» de l'aide à la Grèce, dans une lettre adressée à ses homologues de la zone euro ainsi qu'au président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet et rendue publique mercredi.

«En tant que président de l'Eurogroupe, je suis en train de négocier une solution globale pour la Grèce, avec 17 autres collègues» du forum des ministres des Finances de l'Union monétaire, a ajouté M. Juncker.

Il a indiqué toutefois ne pouvoir encore donner de montant pour ce nouveau plan de soutien, venant après celui de 110 milliards de prêts du Fonds monétaire international et de l'Europe, décidé en 2010 et courant sur trois ans.

«Je ne peux pas vous donner un chiffre exact, parce que tout dépendra du volume que l'implication du secteur privé sera à même de mobiliser», a-t-il expliqué.

Les Européens souhaitent que les banques privées créancières de la Grèce apportent aussi leur contribution à ce nouveau plan, mais les avis divergent entre eux sur la forme que cela doit prendre.

L'Allemagne plaide en faveur d'un rééchelonnement de la dette grecque détenue par les banques. Ce que refusent la Commission européenne et la BCE qui craignent que cela sème la panique sur les marchés. Elles préfèreraient une méthode plus «douce», où les banques accepteraient, sur une base volontaire, de prolonger leurs prêts à la Grèce lorsque ceux qu'elles lui ont déjà octroyés arrivent à échéance.