La croissance est restée molle fin 2010 dans la zone euro, stagnant à 0,3% au quatrième trimestre, alors que les inquiétudes persistent sur ses membres les plus fragiles, à la traîne, et sur sa capacité à surmonter la crise de la dette.

Cette première estimation, publiée mardi par l'office européen des statistiques Eurostat, a déçu les économistes qui espéraient une petite accélération. Le commissaire européen aux affaires économiques, Olli Rehn, a aussi évoqué «une croissance solide mais pas une croissance suffisante».

Cela porte toutefois l'augmentation du Produit intérieur brut (PIB) à 1,7% sur l'année 2010, un rebond bienvenu après le recul historique de 4,1% accusé en 2009 sur fond de crise financière.

Eurostat n'a fourni aucun détail à ce stade. Mais pour les économistes, le mois de décembre très froid a pénalisé l'activité dans la construction.

C'est particulièrement vrai dans la première économie de la zone euro, l'Allemagne, où la croissance a encore ralenti au quatrième trimestre, à 0,4% après 0,7% au troisième et 2,2% au deuxième.

Certains économistes, comme Chris Williamson chez Markit, pointent aussi la performance «médiocre» de la France: le PIB y a augmenté de 0,3%, moitié moins qu'espéré par la Banque de France.

«La période de grèves du mois d'octobre a eu un effet plus dépressif sur la croissance que ce qu'on anticipait», a reconnu la ministre française des Finances, Christine Lagarde.

Vu la confiance et le niveau d'activité des entreprises, beaucoup d'économistes tablent sur un rattrapage au premier trimestre 2011, mais estiment que sur toute l'année, la zone euro affichera une croissance inférieure à celle de 2010.

Les membres historiques du «coeur» de la zone profitent beaucoup de la reprise mondiale. L'Allemagne ou les Pays-Bas affichent ainsi des exportations solides. Mais elles risquent de «perdre au moins un peu de vigueur», prévient Jonathan Loynes, économiste chez Capital Economics.

«De sérieux vents contraires existent et certains d'entre eux vont se renforcer en 2011», prévient aussi Howard Archer chez IHS Global Insight.

Et d'évoquer la «pression budgétaire» croissante, alors que les gouvernements européens réduisent leurs déficits en augmentant les impôts ou en diminuant leurs dépenses, «et probablement de nouvelles tensions sur la dette souveraine».

Howard Archer s'inquiète aussi des «divergences marquées entre les performances de croissance» des pays du coeur de la zone euro et de ceux, plus fragiles, de la périphérie.

Les chiffres nationaux de croissance au quatrième trimestre sont révélateurs.

Outre l'Allemagne ou la France, les Pays-Bas et l'Autriche résistent avec un PIB en hausse de 0,6%.

L'Espagne relève un peu la tête, avec une croissance de 0,2%.

Mais l'Italie déçoit avec une croissance tombée à 0,1%.

La Grèce reste profondément en récession, avec un PIB en baisse de 1,4%.

Et le Portugal inquiète avec le premier recul de son PIB depuis un an (-0,3%). Son ministre des Finances, Fernando Teixeira dos Santos, a reconnu que «l'ajustement budgétaire a eu un impact sur la consommation publique et privée».

Le pays a adopté des mesures d'austérité pour rassurer les marchés, qui voient en lui un nouveau candidat potentiel à un sauvetage financier, après la Grèce et l'Irlande l'an dernier.

Des marchés où les taux d'intérêt des pays jugés fragiles sont remontés ces derniers jours.

Certains incriminent la «lenteur» de l'Europe à se doter d'un dispositif de réponse à la crise de la dette, et Olli Rehn a d'ailleurs appelé à accélérer le mouvement.

La croissance insuffisante «souligne l'importance de nous mettre d'accord sur une stratégie convaincante pour la croissance, la compétitivité et l'emploi», a-t-il indiqué, espérant que cela interviendrait en mars.