Quel est l'endroit au pays où il y a le plus de « logements Airbnb » ? Le centre-ville de Montréal. Des trois plus grandes villes du pays, c'est dans la métropole québécoise que la présence d'Airbnb aurait le plus de répercussions sur le marché locatif et où les locateurs professionnels accapareraient la plus grande partie des revenus, selon une nouvelle étude de l'Université McGill. Portrait d'un phénomène qui pourrait coûter jusqu'à 138 $ de plus par an aux locataires montréalais.

PLUS D'« APPARTEMENTS AIRBNB » À MONTRÉAL QU'À TORONTO

Nombre d'appartements ou de maisons à Montréal loués uniquement sur Airbnb, selon l'étude de David Wachsmuth, professeur à l'École de développement urbain de l'Université McGill, qui a utilisé les données extraites de la firme Airdna. C'est davantage qu'à Toronto. Les « appartements Airbnb » sont concentrés principalement au centre-ville de Montréal (1467 appartements, 30 % des logements Airbnb à Montréal) et dans le Plateau Mont-Royal (1469 appartements, 30 %).

1 POUR 1 DANS LE PLATEAU

Dans le Plateau Mont-Royal, il y a autant d'appartements Airbnb que de logements réguliers non loués. En d'autres mots, les appartements Airbnb et les logements inoccupés représentent chacun 2,3 % des appartements locatifs du Plateau Mont-Royal. Au centre-ville de Montréal, les logements Airbnb représentent 3,3 % du marché locatif, alors que le taux d'inoccupation est de 4,6 %.

INFLUENCE ÉNORME

Selon le professeur David Wachsmuth, l'influence d'Airbnb est énorme sur le marché locatif au centre-ville de Montréal et dans le Plateau Mont-Royal. « Ces 5000 "logements Airbnb" ne sont pas utilisés pour être loués à long terme, ce qui augmente inévitablement le coût du loyer dans ces quartiers », dit-il.

« Environ 3 % des loyers, ça n'a pas l'air beaucoup, mais c'est énorme, car le prix des loyers se base beaucoup sur les loyers qui sont libres, soit environ 4 % des loyers à Montréal. »

- David Wachsmuth, professeur à l'École de développement urbain de l'Université McGill

138 $ PAR AN

De combien Airbnb gonfle-t-il les loyers à Montréal ? L'étude de l'Université McGill, qui sera publiée officiellement la semaine prochaine, ne répond pas précisément à cette question. Mais une étude américaine réalisée par des professeurs de l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA) et de la University of Southern California (USC) publiée le mois dernier concluait que chaque hausse de 10 % des annonces d'Airbnb dans une ville se traduisait par une hausse de 0,39 % du prix des loyers (il s'agit de conclusions préliminaires, l'étude devant être évaluée par d'autres économistes). Depuis un an, le nombre d'annonces Airbnb à Montréal a augmenté de 39 %, ce qui voudrait dire une hausse de 2,3 % du prix des loyers. Sur un loyer moyen de 767 $ par mois, cela donne une estimation de 11,51 $ par mois, soit 138 $ par an. Airbnb conteste les deux études sur lesquelles s'appuient ces calculs.

LE TOP 10 % TRÈS ACTIF

Encore plus qu'à Toronto et Vancouver, les locateurs professionnels d'Airbnb sont très actifs à Montréal. Le top 1 % le plus actif y accapare 14 % des revenus (18 millions), le top 5 % y accapare 39 % des revenus (51 millions) et le top 10 %, environ 57 % des revenus (74 millions). De leur côté, 90 % des utilisateurs les moins actifs d'Airbnb - les locateurs occasionnels - n'accaparent que 43 % des revenus (57 millions). « Airbnb dit souvent que 80 % de ses utilisateurs sont des familles qui louent leur maison de temps en temps. C'est vrai, j'arrive aux mêmes chiffres, mais c'est trompeur », dit le professeur Wachsmuth.

« Tout le monde peut louer sa maison s'il part un week-end, mais le gros de l'argent sur Airbnb est fait par des locateurs professionnels. »

- David Wachsmuth

DES CONCLUSIONS « SANS FONDEMENT », DIT AIRBNB...

Airbnb conteste vivement les conclusions de l'étude de l'Université McGill, indiquant que « l'auteur a un historique de manipuler les données extraites pour dénaturer les hôtes d'Airbnb, la vaste majorité d'entre eux étant des familles canadiennes de classe moyenne qui partagent leur maison pour avoir un revenu additionnel afin de payer leurs factures ». « Il y a seulement un très petit pourcentage des locations [Airbnb] à Montréal qui est loué assez fréquemment pour faire davantage de revenus qu'un logement à long terme, ce qui mine les conclusions sans fondements de l'auteur sur le nombre d'unités de location à long terme retirées du marché », indique par courriel Lindsey Scully, porte-parole d'Airbnb au Canada. Selon l'entreprise, 77 % de ses clients montréalais louent seulement leur résidence principale.

... ET PAS « D'IMPACT SIGNIFICATIF »

Airbnb conteste aussi le fait que ses activités pourraient entraîner une hausse des loyers, contredisant ainsi les conclusions de l'étude américaine de l'UCLA et de la USC. « Airbnb rend le logement plus abordable - plusieurs familles dépendent d'Airbnb pour payer le loyer et rester dans leur maison. Et 95 % des économistes et des experts du logement consultés disent que le partage de maison n'a pas d'impact significatif sur les loyers », a indiqué par courriel la porte-parole Lindsey Scully.

Activités d'Airbnb Juin 2016-Mai 2017

Ville / Revenus de location / Hausse annuelle

Montréal / 131 millions / 23 %

Toronto / 162 millions / 94 %

Vancouver / 137 millions / 55 %

Source : étude de l'Université McGill s'appuyant sur les données de la firme Airdna