Radio-Canada a imposé à la mi-avril de nouvelles conditions à la douzaine d'acheteurs potentiels pour la Maison de Radio-Canada à Montréal dans une lettre d'intention rédigée uniquement en anglais, a appris La Presse.

Dans cette lettre d'intention, Radio-Canada, qui veut déménager dans de nouveaux locaux à Montréal, se réserve le droit de garder une partie des terrains actuellement mis en vente, par exemple pour y installer ses nouveaux locaux. La société d'État prévoit aussi la possibilité de rester dans sa tour actuelle pour une période allant jusqu'à six ans.

Jusqu'à présent, cette lettre d'intention est l'un des documents les plus importants du processus de vente de la Maison de Radio-Canada. Elle contient les conditions à respecter pour la douzaine d'acheteurs intéressés afin de soumettre une offre valide à la date limite de la fin d'avril. En ce qui concerne le fait que la lettre d'intention aux acheteurs potentiels soit rédigée seulement en anglais, Radio-Canada soutient qu'il s'agit « d'une pratique courante pour ce type de transaction ». Radio-Canada précise que les autres communications entourant la vente des installations « ont eu lieu dans les deux langues [officielles] ».

« Il est à noter qu'aucune demande pour une version française n'a été soumise à CBC/Radio-Canada. Le cas échéant, nous l'aurions fournie avec diligence », a indiqué Marc Pichette, directeur des relations publiques de Radio-Canada, par courriel. C'est la firme Brookfield qui s'occupe de la vente des installations actuelles pour le compte de Radio-Canada. Brookfield a dirigé nos questions à Radio-Canada.

DEUX NOUVELLES CONDITIONS

En février dernier, Radio-Canada a officiellement mis en vente ses installations montréalaises. Dans le document rendu public en février, la SRC souhaitait « solliciter des offres pour l'acquisition de 100 % des intérêts de la propriété ». Au moins 12 acheteurs potentiels souhaiteraient poursuivre le processus.

Or, selon nos informations, la SRC a ajouté une condition lors de la deuxième phase de l'appel d'offres, à la mi-avril : la société d'État se garde une option à sa discrétion pour conserver une partie des terrains mis en vente. Les acheteurs potentiels ont ainsi dû déposer leurs offres en prévoyant la possibilité que Radio-Canada garde une partie du terrain à la fin du processus - par exemple si Radio-Canada décide d'installer ses nouveaux locaux sur ce même site.

La lettre d'intention à la mi-avril annonçait aussi à la douzaine d'acheteurs potentiels que Radio-Canada se garde le droit de rester dans ses locaux actuels pour 1 $ de loyer jusqu'à six ans. Les conditions initiales de février prévoyaient de telles conditions (Radio-Canada paie 1 $ de loyer, mais assume toutes les dépenses d'entretien) pour trois ans (jusqu'au 31 décembre 2019). La lettre d'intention à la mi-avril ajoute une autre option supplémentaire de trois ans aux mêmes conditions, au cas où les nouveaux locaux de Radio-Canada ne seraient pas prêts.

La société d'État a déjà indiqué son intention de quitter sa grande tour (1,3 million de pieds carrés) car elle estime n'avoir besoin que de 400 000 pieds carrés à Montréal.

Parallèlement au processus de vente de ses terrains actuels (environ 1,05 million de pieds carrés) par Brookfield, Radio-Canada a aussi mandaté une autre firme, Avison Young, pour déterminer différentes options pour les nouveaux locaux de Radio-Canada à Montréal. Trois options sont sur la table : déménager dans des bureaux existants, s'installer dans de nouveaux bureaux ailleurs au centre-ville ou s'installer dans de nouveaux bureaux ailleurs sur le même terrain (actuellement en vente).

UNE RÉUNION DU C.A.

Le conseil d'administration de Radio-Canada, qui doit éventuellement statuer sur la question, se réunit aujourd'hui et demain. Il doit « prendre connaissance des [...] différents scénarios » et « identifier les propositions à retenir pour la prochaine phase du processus ». Cette dernière phase devrait comprendre au moins deux propositions finales - les acheteurs en question passeraient alors les prochains mois à négocier avec Radio-Canada, qui choisira une offre finale.

Le Nouveau Parti démocratique a dénoncé hier à la Chambre des communes le « secret » entourant la vente de la Maison de Radio-Canada à Montréal. « Six mois après l'élection des libéraux, le conseil d'administration est toujours "bourré" de conservateurs, et il prend toujours des décisions majeures dans le secret le plus total, a dit le député Pierre Nantel. La ministre trouve-t-elle acceptable que notre diffuseur public opère dans l'ombre ? » La ministre du Patrimoine canadien Mélanie Joly a répondu qu'elle suit le dossier « de très près » et qu'elle s'affaire « à faire en sorte que le processus soit rendu public au cours des prochaines semaines ».