Brigitte a acquis un condo neuf il y a deux ans. «Je croyais que les problèmes avec les condos neufs, c'était un parquet qui n'est pas comme on le voulait, ou des armoires de cuisine qui ne sont pas de la bonne couleur.»

Rétrospectivement, ç'aurait été une bagatelle. Les petits désagréments signalés aux réunions des copropriétaires sont plutôt du type: fenêtres qui coulent, système d'aération qui communique les odeurs de friture et de cigarette d'un appartement à l'autre, ascenseurs bruyants au point d'empêcher les voisins mitoyens de dormir, dalle de béton au garage qui laisse l'eau filtrer sur les voitures de l'étage du dessous.

Le conseil d'administration de cet immeuble en copropriété de 90 appartements - appelons-le le Condo Idéal - poursuit le promoteur pour 2,5 millions de dollars. En attendant un règlement, il a fallu effectuer les réparations urgentes. «Tu ne peux pas laisser les gens avec des problèmes de ventilation jusqu'à ce que ça se règle à la cour!» lance la gestionnaire de ce condo, Céline Corriveau, du Groupe Immobilier Celico.

Ce sont les charges de copropriété qui encaissent le coup, ainsi que Brigitte en a fait l'amère expérience. Alors qu'elles auraient dû être de 125$ par mois pour son petit studio, elles ont été portées à 145$, avant d'exploser à 277$ avec les cotisations spéciales.

Déstabilisée, inquiète, Brigitte ne voulait pas vivre dans ce logement de Damoclès. Elle l'a vendu sans rien cacher, au prix qu'elle l'avait payé il y a deux ans, soit 12 000$ de moins que ce qu'elle aurait normalement dû obtenir. Elle a consenti à payer le supplément aux charges de copropriété jusqu'à la fin de l'année financière actuelle.

De jeunes acheteurs qui acquièrent leur première propriété avec des moyens limités se voient ainsi pris à la gorge par la hausse inattendue des charges communes.

L'achat dans un petit immeuble n'immunise pas non plus contre les mauvaises surprises. En 2005, Ève Brault a acheté sur plan un condo dans un petit édifice de quatre appartements. La livraison était prévue le 1er juillet 2006. Elle en a pris possession le 1er juillet 2007. «Même avec un quadruplex, ils ont réussi à être en retard d'un an!» lance-t-elle.

Brigitte résume bien le problème: «Qui achèterait un condo neuf sur plan s'il savait qu'il risque de telles choses?» Bonne question.

Batailles juridiques

Céline Corriveau en a vu d'autres au cours de ses 20 ans de carrière. «Ce sont des batailles juridiques dans la plupart des condos», indique-t-elle.

Le conseil d'administration d'un autre projet, lui aussi neuf et lui aussi en litige, lui a demandé récemment à combien s'élevait jusqu'à présent les frais d'avocats. «Je leur ai dit: êtes-vous assis? Vous leur avez donné 150 000$ depuis 2008.»

Les avocats sont les principaux bénéficiaires de ces guerres de procédures et d'expertises. À bout de souffle et de patience, le syndicat de copropriété réglera généralement à l'amiable. Encore faudra-t-il que le jugement soit appliqué. Céline Corriveau cite encore un autre cas: «Ils ont obtenu un jugement hors cours il y a deux ans et ça leur a coûté plus cher en frais d'avocats pour faire exécuter le jugement que pour les travaux!»

Mais au moins, une entreprise était là pour répondre. «Bon nombre de projets sont faits sous le nom d'une compagnie qui ferme quand le projet est terminé, et l'entrepreneur en repart une autre pour le projet suivant, soulève Charles Tanguay, porte-parole de l'Union des consommateurs. Avec d'éventuelles poursuites, on peut se retrouver Gros-Jean comme devant.»

Devinez qui paie la note?

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LES CONDOS SUR LE MARCHÉ DE LA REVENTE

Au cours des quatre derniers trimestres, les copropriétés ont fait l'objet de 45% des transactions résidentielles dans l'île de Montréal, soit 8073 ventes sur 17 703.