Jouant la carte de champion français du lait, le groupe Lactalis a lancé une offensive tous azimuts et pris de court ses concurrents en dévoilant mercredi une offre pour le rachat de Yoplait, qui valorise la marque à la petite fleur autour de 1,3 milliard d'euros (1,8 milliard CAN).

Le groupe de la famille Besnier, qui vend ses produits sous les marques Président, Lactel ou Société, a annoncé dans un communiqué avoir déposé une offre pour maintenir Yoplait «dans le patrimoine national».

Un de ses porte-parole a confirmé à l'AFP que le prix de 1,3 milliard cité par le quotidien Les Echos est «proche de la réalité». Il correspond au haut de la fourchette des estimations citées jusqu'ici dans la presse.

L'intérêt de Lactalis pour Yoplait n'est pas nouveau. Il y a trois ans, le président du directoire de l'époque, Michel Léonard, avait déjà évoqué la possibilité d'un rachat, parlant d'«une très belle opération».

Yoplait est actuellement détenu à 50% par le fonds d'investissement français PAI Partners et à 50% par la coopérative laitière Sodiaal.

PAI, entré au capital en 2002, s'est refusé à tout commentaire mais a déjà fait savoir qu'il souhaitait vendre sa participation. Côté Sodiaal, un porte-parole a réaffirmé que le groupe n'était «pas vendeur de ses 50%».

Mais pour Lactalis, «ce projet ne peut se mener que par un contrôle majoritaire du capital de Yoplait permettant de mener une stratégie durable», ce qui implique un rachat de la part de Sodiaal en sus de celle de PAI.

Lactalis est déjà présent dans les yaourts depuis qu'il a pris le contrôle de la marque La Laitière au groupe Nestlé. Avec l'apport de Yoplait, il deviendrait un rival de poids pour le leader français Danone.

«Les négociations vont commencer dans les jours prochains», a indiqué un porte-parole de Lactalis.

Pour amadouer la première coopérative laitière française, Lactalis se dit «prêt à associer Sodiaal au développement de Yoplait, notamment dans la gestion de la marque». Il assure également que les contrats d'approvisionnement laitier avec Sodiaal seront maintenus «aux mêmes conditions».

La démarche de positionner publiquement son offre, alors que rien ne l'y obligeait puisque aucun des acteurs du dossier n'est coté, laisse entendre que Lactalis cherche à fédérer autour de sa candidature. L'objectif: créer «un groupe français leader mondial de l'industrie laitière».

Le géant aux 38 700 salariés et 8,5 milliards d'euros de ventes annuelles joue à fond la carte hexagonale en rappelant avoir «toujours eu la volonté de maintenir un ancrage fort sur le territoire français» tout en cherchant «sans cesse de nouveaux débouchés à la production laitière française».

Cet argumentaire pourrait ne pas laisser insensible l'exécutif, alors que le problème de la perte de compétitivité de la filière lait est régulièrement mentionné.

Mardi soir, lors de son intervention télévisée, le président de la République Nicolas Sarkozy a déclaré qu'il n'était «pas acceptable» que les producteur français «perdent des parts de marché sur le lait» au profit des Allemands.

Yoplait a généré environ 3,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2010, en direct mais surtout via des franchisés, notamment aux Etats-Unis, où il est le numéro un des produits laitiers frais.

En se positionnant tôt, avant même que les enchères ne soient officiellement ouvertes, Lactalis a pris de court le suisse Nestlé et l'américain General Mills, qui fabrique et distribue depuis près de 30 ans les produits de la marque aux États-Unis, souvent mentionnés comme des acquéreurs potentiels.

D'autant que le groupe français se présente avec un financement déjà bouclé, selon Les Echos. Une information que n'a pas démentie Lactalis.