Les perspectives économiques aux États-Unis sont rendues «plus incertaines» par les turbulences sur les marchés financiers qui vont aussi influencer le rythme des futures hausses de taux directeurs, ont estimé les membres de la Réserve fédérale (Fed) lors de leur dernière réunion monétaire.

Selon le procès-verbal de cette réunion des 26 et 27 janvier publié mercredi, la Banque centrale a pris acte d'un «durcissement» des conditions financières aux États-Unis et estime que «l'incertitude» quant aux perspectives économiques a augmenté face à ces «récents développements économiques et financiers».

Les membres de la Fed ont averti qu'ils prendraient en compte, entre autres, les implications des turbulences sur les marchés pour «le rythme et le calendrier» des futurs ajustements monétaires.

Après les avoir relevés en décembre 2015 pour la première fois en neuf ans, le Comité monétaire de la Fed (FOMC) avait laissé les taux directeurs inchangés il y a trois semaines, notant le ralentissement de la croissance américaine au quatrième trimestre et le sévère accès de volatilité des marchés.

Les considérations de la réunion laissent penser que la Fed, qui a déjà prôné un relèvement graduel des taux, pourrait ne pas être pressée de les augmenter lors de leur prochain Comité des 15 et 16 mars.

«Voilà un ton résolument prudent», a noté Omer Esiner, analyste pour le cabinet Commonwealth Foreign Exchange. «Ce procès-verbal ajoute une teinte bien plus accommodante au langage de la Fed et suggère qu'il est moins probable que la banque centrale relève les taux en mars», ajoute-t-il.

Pour Sal Guatieri de BMO Capital Markets, la Fed «sera très réticente à faire feu une seconde fois, à moins d'avoir plus de clarté sur l'impact de la dégradation des conditions financières».

La Fed avait relevé modestement ses taux directeurs à la mi-décembre, pour les fixer entre 0,25% et 0,50%, après les avoir laissés proches de zéro depuis fin 2008 pour soutenir la reprise.

La chute des marchés a l'effet d'une hausse des taux

Au cours de la dernière réunion, les membres de la Fed se sont ainsi longuement penchés sur l'impact de cette nervosité financière, évoquant la baisse des prix des actions, les obligations des entreprises et le renforcement du dollar.

«Si ces développements persistaient, les implications pourraient être grosso modo l'équivalent d'un resserrement de la politique monétaire», jugent même certains participants.

La chute des prix des actions à la Bourse fait aussi craindre un surcroît de prudence de la part des consommateurs, certains à la Fed remarquant que le taux d'épargne s'est accéléré chez les Américains depuis le milieu de l'année dernière.

Mais globalement, la banque centrale estime que la poursuite de la croissance modeste de l'économie américaine sera tirée par les dépenses de consommation, favorisées par les économies réalisées grâce à la chute des prix pétroliers.

Concernant la Chine, certains se sont inquiétés du fait que les changements structurels en Chine et les déséquilibres financiers puissent «conduire à une décélération de l'économie plus sévère que prévu».

«Le cas échéant, cela augmenterait le stress économique et financier sur les économies émergentes et autres producteurs de matières premières comme le Canada et le Mexique», qui sont parmi les premiers partenaires commerciaux des États-Unis.

«Sans compter», ajoute la Fed, «que les marchés financiers mondiaux pourraient continuer d'être affectés par l'incertitude quant au régime de change chinois». Certains s'inquiètent ainsi «du frein potentiel du ralentissement en Chine sur l'économie des États-Unis».

Globalement, faisant écho aux remarques de la présidente de la Fed Janet Yellen au Congrès la semaine dernière, les responsables de la banque centrale jugent qu'il est pour l'instant «prématuré» de modifier leurs perspectives économiques et que l'impact de la nervosité des marchés et du ralentissement chinois n'est «pas clair».

Ils continuent en majorité à penser que l'emploi va continuer à s'améliorer et l'inflation remonter progressivement vers l'objectif de 2% à moyen terme une fois que s'estomperont les effets de la baisse des prix du pétrole et du renforcement du dollar.