La Cour suprême des États-Unis a commencé, mardi, à entendre l'appel logé par les avocats de l'ex-magnat de la presse Conrad Black, qui contestent sa condamnation pour fraude et entrave à la justice.

Les juges ont posé des questions très serrées qui portent à penser que la loi fédérale en vertu de laquelle Black a été trouvé coupable est peut-être trop large.

Black, qui purge une peine d'emprisonnement de six ans et demi, n'était pas présent pour l'audience puisqu'il ne peut être remis en liberté sous caution.

Les membres de sa famille, dont sa fille, Alana, et son fils, James, étaient présents dans la salle.

Conrad Black en appelle de sa condamnation pour fraude depuis sa cellule de prison en Floride, dans un ultime effort pour renverser sa condamnation pour fraude. Un jury américain de Chicago a trouvé Black et deux autres dirigeants de Hollinger coupables d'avoir fraudé la société à hauteur de 6,1 millions de dollars, en se donnant des primes illégales

Son avocat, Miguel Estrada, a fait valoir que «le Congrès a échoué dans ses tentatives de rédiger une loi claire au sujet des fraudes et des entraves à la justice lorsque la Cour suprême lui en a fait la demande en 1987. Le tribunal a demandé au Congrès de parler clairement et il ne l'a pas fait» a-t-il plaidé.

Selon lui, la loi est tellement vague qu'elle donnait aux procureurs la possibilité de mettre en accusation et d'obtenir une condamnation pour tout comportement qui paraît suspect.

«Le verdict dans cette affaire doit être renversé», a-t-il estimé.

Plusieurs juges ont semblé d'accord, dont la plus récente membre de la Cour suprême, Sonia Sotomayor.

Le juge Stephen Breyer, considéré comme l'un des juges plus libéraux de la Cour, a été particulièrement énergique quand il s'est adressé à l'avocat du gouvernement, Michael Dreeben. Le juge Breyer lui a affirmé qu'en vertu de cette loi, un employé pourrait être condamné pour avoir assisté à un match de baseball pendant ses heures de travail.

«Il y a 150 millions de travailleurs aux États-Unis; je pense que 140 milions échoueraient le test», a ajouté le juge Breyer.

La loi concerne les «honnêtes services» auquel un employeur est en droit de s'attendre d'un employé.

Certains juges ont laissé entendre que la portée de la loi avait besoin d'être rétrécie, tandis que d'autres se sont demandés si elle ne devrait pas être complètement abolie.

James Morton, un criminaliste de Toronto qui a suivi le dossier de Black, doute que celui-ci puisse gagner sa cause, évaluant même à moins d'une sur trois ses chances de l'emporter.

Selon Me Morton, même si la Cour suprême donnait raison à Black sur la question des «honnêtes services», il demeure coupable d'entrave à la justice - ce qui, selon certains, est au moins aussi grave que n'importe quelle autre accusation.

La cause de Black est l'une des trois impliquant la notion des «honnêtes services», sur laquelle se penche la Cour suprême.

Si Conrad Black gagnait son appel, il pourrait être par la suite plus difficile pour le gouvernement américain de faire condamner des membres du personnel de direction soupçonnés de fraude.

Une décision dans ces trois dossiers ne sera probablement pas rendue avant le mois de juin.