Les prix à la consommation aux Etats-Unis n'ont dû qu'à la hausse de la fiscalité sur le tabac de ne pas reculer en avril, mais les analyses minimisent les risques de voir la première économie mondiale chuter dans une spirale déflationniste.  

L'indice des prix à la consommation est resté parfaitement stable le mois dernier par rapport à mars, comme le prévoyaient les économistes, selon les chiffres corrigés des variations saisonnières diffusé vendredi par le département du Travail.

Ces chiffres montrent que «la récession continue d'étouffer la capacité des vendeurs à imposer des hausses», a relevé l'économiste indépendant Joel Naroff.

L'évolution des prix sur un an, qui était devenue négative en mars pour la première fois depuis 1955, est désormais de -0,7%, selon les chiffres publiés vendredi par le département du Travail.

Cette évolution ne trouble guère les économistes, puisqu'elle s'explique largement par une chute des prix de l'énergie (-25,2%) intervenue essentiellement d'août à décembre.

«Le chiffre global de déflation ne sera pas d'une grande ampleur dans l'année à venir et se retournera au fur et à mesure de la reprise de l'économie», explique Andres Carbacho-Burgos, de Moody's Economy.com.

Hors énergie et alimentation, la poussée des prix en avril, qui ont pris 0,3% sur un mois alors que les économistes tablaient sur 0,1%, s'explique par une forte hausse des taxes qui a provoqué une hausse de 9,3% du prix du tabac et des cigarettes.

«Une meilleure façon de mesurer l'évolution sous-jacente est fournie par les prix hors énergie, alimentation et tabac, qui ont pris 0,16% en avril après 0,06% en mars», relève Ian Shepherdson, de HFE Economics.

Mais il ajoute immédiatement que cette hausse principalement vient de deux secteurs où la demande est peu sensible aux évolutions de prix, la santé (+0,4%) et la catégorie «éducation et communication» (+0,3%). M. Naroff les qualifie de «suspects habituels» de l'inflation.

L'automobile (+0,4%) se rattrape pour sa part de ses rabais précédents.

«Dans le même temps, le coût de l'habillement, de l'alimentation, de l'énergie, des transports, du logement et des loisirs ont tous été en baisse», énumère l'économiste.

Et cette tendance devrait durer «à cause du creux considérable dans l'utilisation des capacités de production», a estimé Elsa Dargent de Natixis. Selon les données publiées par la Réserve fédérale, celles de l'industrie américaine ne sont employées qu'à 69,1%, le plus bas niveau depuis 1967.

Le mot de déflation ne vient cependant pas sous la plume des observateurs, avec une inflation de base (hors énergie et alimentation) qui atteint 1,9% en glissement annuel, très proche du niveau jugé souhaitable par la Fed.

Son président Ben Bernanke avait affirmé lundi que la banque centrale était «déterminée» à combattre ce risque de déflation, qui «est en train de reculer» bien qu'il ne doive «pas être ignoré».

«L'indice de base est sage, mais ne signale pas déflation», estime Nigel Gault, de HFE Economics, selon lequel cette inflation ne devrait pas descendre sous les 1,6% cette année.

«Il semble y avoir peu de raisons de s'inquiéter d'une spirale déflationniste», confirme Dean Baker, du Center for Economic and Policy Research, en relevant que les prix à la production hors énergie et alimentation restaient en hausse de 3,4% sur un an en avril.

«Il n'y a pas d'inflation et en vérité, la direction des prix n'est ni à la baisse ni à la hausse», ajoute Joel Naroff.

Les consommateurs soupçonnent tout de même les vendeurs de vouloir relever les étiquettes. Selon une enquête mensuelle de l'université du Michigan publiée vendredi, ils s'attendent à une inflation de 2,6% dans l'année à venir.