Ciment McInnis est dorénavant détenue à 66 % par Beaudier Ciment et à 34 % par des actionnaires minoritaires, dont Investissement Québec.

L'information est donnée au compte-gouttes, mais avec beaucoup d'insistance, les médias obtiennent quelques réponses à leurs questions concernant la cimenterie de la Gaspésie dans laquelle les Québécois ont investi collectivement pas moins d'un demi-milliard de dollars jusqu'à maintenant.

Beaudier Ciment est une coentreprise ayant comme actionnaires la Caisse de dépôt et placement et Beaudier, le holding de la famille Bombardier-Beaudoin. Avec la nouvelle ronde de financement, la Caisse détient dorénavant 55 % de Beaudier Ciment à la suite de son investissement de 140 millions en capital-actions et de 125 millions en actions privilégiées. Beaudier en détient maintenant 45 %. À l'origine, Beaudier Ciment contrôlait 51,1 % de Ciment McInnis.

Chez Beaudier, on ne répond pas aux questions des journalistes au sujet de l'investissement du holding dans ce qu'il considère comme une entreprise privée. Combien Beaudier a-t-il mis d'argent dans la cimenterie, maintenant évaluée à 1,5 milliard ? Si on applique la règle de trois, on arrive à un investissement d'une valeur approximative de 216 millions pour Beaudier dans Ciment McInnis. Beaudier devait initialement mettre entre 112,7 et 150 millions dans la cimenterie, selon les articles de presse parus en janvier 2014.

De son côté, la société d'État Investissement Québec (IQ) a finalement confirmé que sa participation de 100 millions dans le capital-actions de McInnis avait été diluée depuis l'annonce du projet, passant de 22,6 % à 17,7 %. « C'est la valeur en cas de liquidation. On va obtenir 17,7 % », a précisé Chantal Corbeil, porte-parole d'IQ.

Beaudier Ciment nomme sept des 11 membres du conseil de Ciment McInnis et les actionnaires minoritaires en nomment quatre. Des quatre, le gouvernement en nomme un.

Si les actionnaires minoritaires détiennent 34 % de Ciment McInnis et qu'IQ a 17,7 % des actions, ça laisse donc 16,3 % aux tiers, qui n'ont pas été identifiés publiquement.

D'AUTRES PROVISIONS POUR PERTES À PRÉVOIR SUR LE PRÊT GOUVERNEMENTAL

Plusieurs lecteurs de La Presse ont fait part de leur crainte que le gouvernement n'efface son prêt pour permettre à la Caisse et à Beaudier de réaliser un profit malgré les dépassements de coûts de 450 millions dans la construction de la cimenterie.

Le prêt du gouvernement est en effet à risque de perdre son rang. Les discussions se poursuivent entre les parties pour déterminer qui aura préséance entre le syndicat bancaire mené par la Banque Nationale, qui a prêté 360 millions, Investissement Québec, qui a prêté 250 millions, et la nouvelle débenture de 125 millions de la firme américaine BlackRock.

Investissement Québec a déjà passé une provision pour pertes de 116 millions sur ses interventions de 350 millions au total dans McInnis. Ce chiffre pourrait encore augmenter, reconnaît Québec.

« Des fois, on réévalue en cours de route. Comme il y a eu une réévaluation du projet, probablement qu'il va y avoir une réévaluation [de la provision pour pertes]. C'est en discussion présentement, ces choses-là. »

- Chantal Corbeil, porte-parole d'Investissement Québec

La Caisse n'a pas pris de provision sur ses interventions dans Ciment McCinnis. Le premier vice-président Québec, Christian Dubé, a soutenu en conférence téléphonique que les perspectives de rendement sont meilleures aujourd'hui qu'au moment de l'investissement initial, malgré les dépassements de coûts, en raison de l'amélioration des conditions de marché du ciment.

Comment, pour un même projet, un actionnaire minoritaire peut-il parler d'augmenter sa provision pour pertes au moment où l'actionnaire majoritaire soutient que les perspectives de rendement se sont améliorées ?

« Le gouvernement ne calcule pas les pertes de la même façon, a expliqué Mme Corbeil. Le gouvernement n'a pas le choix. Il doit prendre toutes les pertes tout de suite pour toutes les années à venir. Une entreprise privée prend une provision annuelle, donc c'est beaucoup moins élevé parce qu'elle regarde seulement sur un an. »

La construction de la future cimenterie de Port-Daniel-Gascons, d'une capacité de production de 2,2 millions de tonnes, est terminée à 60 %. Les premières livraisons de ciment sont prévues en 2017. Une large proportion d'entre elles sera destinée au marché américain.