Investissement Québec (IQ) était contre l'idée d'investir dans le projet d'hydroliennes de RER Hydro, mais il y a été forcé par le gouvernement Marois.

«Ils nous l'ont rentré dans la gorge», a confié une source à IQ. La société d'État a dû allonger deux prêts totalisant 10 millions de dollars parce que le projet «se trouvait dans la bonne région», résume-t-on.

Selon les informations obtenues par La Presse, le ton a monté entre IQ et le conseil exécutif, l'équivalent du ministère de Pauline Marois, quand la société d'État a fixé à 10 millions la provision à prévoir aux livres pour couvrir ce prêt, qu'elle jugeait extrêmement risqué. Mais le patron d'Investissement Québec, Mario Albert, n'a pas eu le choix tant la pression était forte pour faire avancer le projet. La participation de Boeing, qui s'engageait à en faire la promotion et à garantir les turbines pour 25 ans sur le marché international, était vue comme un aspect très intéressant par le gouvernement Marois.

Mais surtout, avec son usine de fabrication de turbines à Bécancour, RER Hydro «se trouvait dans la bonne région». IQ avait avancé 4,9 millions en mai 2013 et 4,5 millions en 2014 - il restait 2,9 millions à verser cette année. Le fait qu'elle se trouve en Mauricie avait considérablement contribué à ce que le gouvernement Marois veuille faire avancer le projet. On savait déjà que cette région serait chaudement disputée aux élections à venir. Le gouvernement Marois avait même fait un «blitz» d'annonces dans cette région à quelques semaines du déclenchement des élections.

Plus récemment, le projet manquait encore cruellement de financement, et Québec avait tenté de maintenir l'entreprise en vie en la reprenant en quasi-totalité pour 4 millions, afin d'essayer de sauver ses prêts antérieurs. À quelques jours des élections, la transaction de sauvetage ne s'est toutefois jamais faite. Il y avait un espoir que l'affaire puisse redécoller avec une liste de nouveaux administrateurs, explique-t-on maintenant.

Hier, à l'Assemblée nationale, Jacques Daoust, ancien patron d'IQ devenu ministre de l'Économie, a soutenu qu'il s'opposait fermement au rachat de RER Hydro, le scénario étonnant proposé par Investissement Québec six jours avant la date du dernier scrutin provincial.

Il y a deux jours seulement, la porte-parole d'IQ a affirmé ne pas pouvoir commenter l'offre gouvernementale puisque des discussions sont en cours avec l'entreprise de Bécancour, dans le Centre-du-Québec.

«Ce n'est pas l'intention du gouvernement de créer une nouvelle société d'État ou de l'acquérir dans la fabrication et la distribution d'hydroliennes», a laissé tomber hier le ministre à la suite d'une question de l'opposition caquiste. D'autres sources rappellent que M. Daoust était, comme d'autres investisseurs potentiels, aux présentations de RER Hydro, et ce, dès 2011.

Un dossier clos

Selon Jacques Daoust, le gouvernement a déjà englouti 9,6 millions - à 100 000$ près, a-t-il précisé - dans RER Hydro, une entreprise au stade des prototypes qui a accumulé des dettes de 28 millions et un déficit de 23 millions. Au total, le gouvernement avait autorisé une somme d'environ 15 millions.

«La façon de procéder dans un dossier comme celui-là est de faire une analyse objective de la part des intervenants ministériels et d'Investissement Québec et au gouvernement de décider. Depuis que je suis en poste, je reprends chacun des dossiers, je les étudie rigoureusement, comme on s'est engagé à le faire, et je peux vous assurer d'une chose: ce genre de dossier-là, monsieur, ne reviendra pas», a-t-il conclu.