Le gouvernement Marois a pris connaissance «dans les derniers jours» de l'entente secrète entre Hydro-Québec et Pétrolia sur les droits du pétrole et gaz à Anticosti. C'est le député caquiste François Bonnardel qui a soulevé la question jeudi en Chambre.

Martine Ouellet a répondu être la première ministre des Ressources naturelles à l'avoir lue. Au Parti libéral, on n'était pas en mesure hier de confirmer ou infirmer cette information.

«Vous connaissez notre position. Nous avons demandé pendant plusieurs mois, sinon des années, que cette entente soit rendue publique. Nous n'avons pas changé d'idée», a-t-elle dit.

Mais le choix ne lui appartient pas. Après avoir accusé le gouvernement libéral de garder l'entente secrète, Mme Ouellet constate qu'elle est aux prises avec la même clause de confidentialité. Il faut l'accord de la société d'État et de Pétrolia pour dévoiler l'entente. «Nous devrons avoir des discussions avec les deux signataires de l'entente pour la rendre publique», a-t-elle reconnu.

C'est sous un gouvernement libéral qu'on a vendu les droits sur un potentiel estimé à plus de 30 milliards de barils de pétrole, a tenu à rappeler Mme Ouellet. Il s'agirait en bonne partie de pétrole de schiste.

Selon une estimation réalisée l'an dernier par la firme Sproule Associates de Calgary, le gisement pourrait valoir 3000 milliards de dollars.

Pétrolia change d'idée

L'ex-ministre libérale Nathalie Normandeau souhaitait rendre l'entente publique, l'an dernier, mais elle s'est butée au refus de Pétrolia.

«On a acheté (les droits pétroliers). On a payé ce qu'on avait à payer. Ça nous appartient à nous autres (...) Laissez-nous donc trouver du pétrole, après ça vous commencerez à compter combien il va rentrer dans chacune des poches des Québécois», avait alors dit le patron de Pétrolia, André Proulx.

La société a depuis changé d'idée. L'été dernier, M. Proulx a promis de dévoiler l'entente quand il aura signé des partenariats commerciaux pour profiter de la ressource. Si on le faisait avant, on nuirait à ces négociations, a-t-il soutenu.

Comme d'habitude, Hydro-Québec refuse de donner de l'information sur le dossier. «On est en contact constant avec le gouvernement du Québec. Pour le reste, on ne commentera pas le dossier», a indiqué son porte-parole, Gary Sutherland.

Entente raisonnable?

La ministre Ouellet n'a pas osé critiquer ou même commenter l'entente. «Actuellement, nous analysons les implications de l'entente. On ne peut pas, à sa simple lecture, tirer de conclusion. Ça prend des analyses, et nous sommes en train de les faire», a-t-elle dit, avant de mettre fin au court point de presse de trois minutes.

Certains de ses collègues ont déjà été plus cinglants. Avant de se lancer en politique et de devenir ministre de l'Environnement, Daniel Breton avait qualifié l'entente de «vol du siècle». En novembre 2011, il avait même porté plainte à la Sûreté du Québec contre le gouvernement Charest.

En 2005, le gouvernement Charest avait démantelé la division pétrole et gaz d'Hydro-Québec. La société d'État conservait des permis d'exploration. Elle les a vendus en 2008.

Combien Hydro-Québec croyait-elle que recelait le gisement au moment de la vente? En avril dernier, le patron de la société d'État, Thierry Vandal, avait répondu que «la question ne se posait pas (à l'époque)». «On avait établi que les techniques classiques d'exploration n'avaient pas conduit aux résultats qu'on escomptait. C'est pour cela qu'on a cédé les permis.» Hydro-Québec ne connaissait pas assez les gisements non conventionnels (pétrole et gaz de schiste) pour en évaluer le potentiel, expliquait-il.