Sursis pour les travailleurs de la raffinerie Shell, à Montréal-Est: la multinationale reporte au 1er juin le démantèlement de ses installations et leur conversion en terminal. Elle lance du coup un contre-la-montre de moins de quatre mois pour trouver un acheteur disposé à relancer l'usine.

Shell a accédé hier à une demande formulée par le gouvernement du Québec. Dans une lettre expédiée à l'entreprise, à la fin de janvier, les ministres Nathalie Normandeau et Clément Gignac lui demandaient de reporter la fermeture de sa raffinerie pour permettre à d'éventuels acquéreurs de se manifester.

Ministre du Développement économique, Clément Gignac s'est dit satisfait de la décision de l'entreprise, mais «il y a loin de la coupe aux lèvres», a-t-il prévenu.

Car le répit ne sert qu'à trouver un nouvel acheteur disposé à prendre la raffinerie en main. Et selon le ministre, ils ne sont pas légion, puisqu'il faut d'importants capitaux et de l'expérience dans le secteur de la pétrochimie, surtout dans un contexte de surcapacité mondiale.

«Il va falloir démontrer la qualité de l'actif, et la qualité des personnes qui y travaillent, explique le responsable du développement économique au comité exécutif de Montréal, Richard Deschamps. Il faut démontrer qu'il y a une possibilité que ce soit rentable pour l'entreprise qui viendrait reprendre la raffinerie.»

Québec se dit prêt à aider un éventuel acheteur, mais pas à n'importe quel prix.

«Le gouvernement ne sera ni exploitant de la raffinerie ni actionnaire, a indiqué M. Gignac. Mais s'il y a des gens qui ont une proposition sérieuse, qu'ils sont prêts à mettre des capitaux et qu'ils ont un plan d'affaires sérieux, on va être prêts à les accompagner.»

Le syndicat des travailleurs de la raffinerie a accueilli la nouvelle avec optimisme. Son président, Jean-Claude Rocheleau, affirme que des acheteurs ont déjà témoigné de l'intérêt pour l'acquisition de l'usine. Selon lui, ce serait d'ailleurs un investissement judicieux.

«Cette raffinerie est rentable, a affirmé M. Rocheleau. Elle a un marché et quand l'économie roule, il n'y a pas de surcapacité.»

Shell a annoncé le 7 janvier qu'elle transformerait sa raffinerie de Montréal-Est en simple terminal. La vaste majorité des 500 travailleurs y perdraient leur emploi, tout comme 300 sous-traitants.

La fermeture met aussi en péril la raffinerie Petro-Canada, située tout près, puisque les deux entreprises partageaient jusqu'ici les coûts d'un pipeline pour s'approvisionner.

Des élus de Montréal, de Québec et d'Ottawa ont depuis formé un comité pour promouvoir la survie de l'industrie pétrochimique de Montréal. Selon Jean-Claude Rocheleau, ils auraient nommé l'ex-ministre conservateur Michael Fortier pour négocier avec Shell et courtiser des acquéreurs potentiels.