Les biocarburants ont mal commencé l'année aux États-Unis, avec la suppression d'un crédit d'impôt qui pourrait pousser des petits producteurs américains à la fermeture, après une année difficile marquée par la crise économique, la baisse des prix du pétrole et les taxes antidumping de l'Union européenne.

Le crédit d'impôt fédéral, d'un montant d'un dollar par gallon (1 gallon équivaut à environ 3,79 litres) de biodiesel subventionnait notamment les salaires, l'achat d'équipement et, si les affaires étaient bonnes, permettait de dégager un bénéfice.

À l'expiration de cette aide vendredi dernier, une prolongation d'un an avait été approuvée récemment par la Chambre des représentants, mais le projet de loi n'a toujours pas obtenu le feu vert du Sénat. Cet avantage fiscal devrait être rétroactif, selon les législateurs.

C'est un coup supplémentaire pour une industrie qui a déjà mal vécu 2009, à l'heure où les États-Unis ont pourtant décidé de participer à la lutte contre le changement climatique et réduire leur dépendance au pétrole étranger.

Le biodiesel, moins polluant que le carburant traditionnel, représentait une solution de rechange intéressante quand le cours de l'or noir flambait, mais les prix de l'essence ont chuté de 18% depuis le début de la récession économique.

La décision de l'Union européenne, en mars, de taxer lourdement les importations américaines de biocarburants, soupçonnées de bénéficier de subventions déloyales, a également durement atteint le secteur, l'UE représentant 95% des exportations américaines de biocarburants.

Le biodiesel, produit à partir d'huile végétale et habituellement mélangé au diesel traditionnel, était le carburant qui avait le plus progressé depuis dix ans pour les flottes de véhicules comme les cars, les camions-poubelles ou encore les chasse-neige. Mais ces flottes peuvent retourner au carburant traditionnel si le prix du diesel baisse, et certaines l'ont déjà fait.

L'industrie américaine du biodiesel ne tourne plus aujourd'hui qu'à 15% de sa capacité potentielle, selon le Bureau national du biodiesel (NBB), qui impute la plus grande partie du ralentissement à la chute des prix de l'essence.

La production est estimée à 300 à 350 millions de gallons en 2009 contre 700 millions l'année précédente pour les près de 180 usines de biodiesel réparties dans une quarantaine d'Etats.

La plus grande raffinerie de biodiesel du pays, à Houston, est à l'arrêt. À Valliant, dans l'Oklahoma, Dwight Francis craint que la suppression du crédit d'impôt ne sonne le glas de la petite usine de biodiesel qu'il a créée début 2009, après le déclin de la filière locale du bois.

Il produit 12 000 gallons (environ 45 425 litres) de biodiesel par semaine et a survécu à la crise économique grâce à la mesure fiscale. «Sans le crédit d'impôt, une fois que vous avez acheté la matière première et les produits chimiques pour produire le carburant, vous y avez investi plus d'argent que vous n'en tirez du carburant. Nous ne pouvons pas produire sans le crédit d'impôt», explique-t-il.

L'année 2009 a été celle des faillites pour les producteurs américains d'éthanol et du scandale pour ceux de biocarburants de deuxième génération.

La société Cello Energy, spécialisée dans la technologie du bioéthanol, a ainsi été reconnue coupable cet été d'avoir escroqué ses investisseurs, et l'agence fédérale pour la protection de l'environnement (EPA) devra probablement se passer de millions de gallons de biocarburant qu'elle comptait mélanger au diesel traditionnel en 2010.

En octobre, le deuxième producteur américain d'éthanol, VeraSun, s'est placé sous la protection de la loi contre les faillites et a vendu ses usines.

D'autres raffineries d'éthanol du pays ont été vendues pour rien. «L'industrie des biocarburants dans son ensemble a eu une année difficile», résume Robert McCormick, l'un des responsables du Laboratoire national des énergies renouvelables au ministère de l'Energie.

Il y a peu de chances que les États-Unis atteignent l'objectif de production de 36 milliards de gallons de biocarburants par an d'ici 2022, qui permettrait au pays d'augmenter sa sécurité et son indépendance énergétiques.

L'avenir n'est cependant pas tout gris pour les producteurs d'éthanol, qui semblent déjà rebondir et bénéficient d'un soutien politique. Le ministère américain de l'Énergie a ainsi annoncé en décembre dernier qu'il consacrerait plus de 600 millions US aux biodiesels de la prochaine génération.