La Presse donne la parole aux grands dirigeants du Québec. Chaque vendredi, un patron répond à cinq questions posées par le chef d'entreprise interviewé la semaine précédente. Et ainsi de suite.

En prenant les rênes de Chocolats Favoris en 2012, vous êtes passé du domaine du jeu vidéo à celui du chocolat. La transition a-t-elle été difficile ?

La transition a été très difficile. Chocolats Favoris est un détaillant et un manufacturier et c'est une réalité très différente du jeu vidéo. La première chose qui saute aux yeux quand tu commences dans cette industrie, c'est que tu travailles avec des produits réels. Ça fait toute une différence. Dans le jeu vidéo, tu travailles avec de l'intangible. Tout tourne autour de la qualité du talent que tu rassembles et de la technologie. Dans notre domaine, tu as aussi besoin d'une équipe extraordinaire, mais travailler avec des produits réels amène toutes sortes de contraintes de distribution et d'entreposage. Si tu veux commander une certaine quantité de matériel et qu'il n'y en a plus, tu as beau pleurer, ça ne changera rien.

Par contre, l'aspect créatif est très semblable. Dans les deux domaines, l'innovation est la clé pour se démarquer.

Chocolats Favoris était à l'origine une chocolaterie artisanale. Comment réussissez-vous à maintenir ce côté authentique tout en déployant vos activités un peu partout au Canada et bientôt à l'international ?

On a un passé de chocolaterie artisanale. Cette authenticité, on veut vraiment la conserver et ça transparaît dans nos produits. Pour nos chocolats fins par exemple, on prend des produits frais, comme de la vraie crème. On utilise aussi du beurre de pommes de l'île d'Orléans pour le chocolat Tarte aux pommes. On utilise beaucoup de produits locaux, comme le sirop et le beurre d'érable biologiques de Thetford Mines. Dans la sélection de nos ingrédients et nos recettes, on est encore très artisanaux. Toutes les décorations de nos chocolats fins sont faites à la main. C'est vrai aussi pour nos moulages de Pâques, qui sont peints à la main.

Évidemment, on a de gros enjeux de déploiement et les volumes d'aujourd'hui n'ont rien à voir avec ceux d'il y a trois ans. Mais on continue et on optimise nos façons de faire. On a encore énormément de chocolatiers à l'interne et on a l'intention de garder cette voie.

La force du réseau de distribution est souvent un facteur clé dans le succès d'une entreprise. Quelle est votre approche en ce sens ?

On est un manufacturier, un distributeur et un détaillant de chocolats. Sur le plan de la distribution par contre, ce n'est vraiment pas là que réside notre force. On se charge nous-mêmes de la distribution pour les régions où on a beaucoup de boutiques, comme Québec et Montréal, mais pour les autres régions où on a moins de concentration, comme à Sherbrooke, on travaille avec un partenaire. C'est la même chose pour les régions éloignées comme Victoria en Colombie-Britannique ou Orléans en Ontario.

Le commerce en ligne et le numérique sont devenus quasi incontournables. Comment intégrez-vous ce volet à votre stratégie d'affaires ?

On a une stratégie numérique qui s'étale sur plusieurs années, une stratégie qui englobe beaucoup plus que le commerce en ligne. On parle aussi des réseaux sociaux, avec un marketing différent selon la plateforme. Pour le commerce en ligne, on a lancé deux piliers très importants de notre stratégie l'an dernier. On a d'abord lancé notre application ChocoFan, qui permet à nos clients de gagner toutes sortes de récompenses en faisant des achats en boutique, mais aussi en réalisant des défis avec nos produits. Il y a un volet social complètement nouveau qui nous a permis de remporter le prix Boomerang pour notre programme de fidélisation. On a aussi lancé un nouveau site web transactionnel, qui intègre le profil client ChocoFan. Le coeur de Chocolats Favoris se trouve dans nos chocolateries. Tout le reste est fait pour bonifier cette expérience ou ramener le client vers les boutiques.

Quelle place occupe l'innovation dans votre entreprise, autant pour les produits que pour les procédés ?

Notre objectif est d'atteindre un chiffre d'affaires de 100 millions d'ici 2020 et l'innovation est un de nos piliers stratégiques. Ça va de soi que n'importe quelle entreprise doit innover pour survivre, mais on veut aller au-delà de ça. On arrive toujours avec de nouveaux produits, que ce soit dans les enrobages, avec des saveurs surprises chaque mois, ou dans les chocolats fins, avec l'introduction d'une nouvelle gamme avant les Fêtes. On a un laboratoire de création de produits vitré, qui donne sur les bureaux administratifs. Ça rappelle aux gens qu'on a besoin de constamment innover.

Pour ce qui est des procédés, on innove aussi. On a conçu nous-mêmes plusieurs de nos équipements. Je pense entre autres à notre ligne de production de fondue au chocolat en conserve qui a été développée ici. On va même jusqu'à imprimer en 3D certaines pièces pour faire des tests avec les chocolatiers et essayer d'améliorer leur travail.

LE PARCOURS DE DOMINIQUE BROWN EN BREF

Âge : 38 ans

Études : Dominique Brown a étudié un an en programmation informatique au Cégep de Sainte-Foy.

Président depuis : janvier 2013 (propriétaire depuis mai 2012)

Nombre d'employés : 1000

Avant d'être président : En 2000, il a fondé le studio de jeux vidéo Beenox. Il a été à la tête de l'entreprise jusqu'en 2012. Il avait travaillé dans le domaine du jeu vidéo un an et demi avant cela.