Chaque année, 30% des arrêts de travail de courte durée sont associés aux problèmes de santé mentale. Au Canada, ils représentent un fardeau économique de 50,8 milliards en perte de productivité. Interpellée par ces statistiques humainement et économiquement dommageables, Bell Canada a choisi d'évaluer ses pratiques internes.

En 2010, l'entreprise s'est associée à la santé mentale en créant un programme de 50 millions répartis sur plusieurs années. Déterminés à faire tomber les préjugés et à soutenir une cause historiquement sous-financée, les dirigeants ont cependant réalisé qu'ils devaient faire davantage. «Nous voulons servir d'exemple aux autres compagnies en améliorant la façon dont nous traitions nos propres employés, explique Mary Deacon, présidente de l'initiative Bell Cause pour la cause. Sachant qu'une personne sur cinq souffre d'un problème de santé mentale au cours de sa vie et que les adultes canadiens passent la majorité de leur temps au travail, on ne pouvait pas faire abstraction de cette réalité chez nous. Par contre, quand nous avons cherché un guide de bonnes pratiques en santé mentale, nous n'avons rien trouvé.»

Bell a donc pris contact avec la Commission de santé mentale du Canada afin que des critères soient créés. «Nous avons financé une partie du travail pour accélérer le processus, précise Mme Deacon. Il y a 15 ans, on commençait à entendre parler d'ergonomie et de santé physique au travail. Aujourd'hui, le moment est venu de protéger la santé mentale de nos employés. Encore trop de patrons croient qu'il s'agit de problèmes personnels dont ils ne doivent pas discuter avec leurs employés. Mais c'est justement ce genre d'inconfort qui décourage les gens d'aller chercher de l'aide.»

Une nouvelle norme est née

Le 16 janvier 2013, la première norme nationale du Canada conçue pour aider les milieux de travail à améliorer la santé et la sécurité psychologique au travail a vu le jour. Une initiative saluée par les organisations en santé mentale, alors que le Canada consacre à peine plus de 7% de son budget de santé à la santé mentale.

Gratuite et volontaire, la norme offre des outils aux entreprises afin de prévenir les dommages psychologiques de certains facteurs de risques en lien avec le travail. «La norme donne un cadre de références sur plusieurs pratiques de gestion: la reconnaissance, la civilité, le respect, la gestion des conflits, la charge de travail, la participation aux décisions, explique Claudine Ducharme, membre du comité d'élaboration de la norme. On offre également des conseils pour favoriser le retour au travail, après un arrêt associé à un problème de santé mentale.»

Le 13 mai, Morneau Sheppel a lancé l'outil Le point sur la santé mentale afin d'accompagner les employeurs dans le processus. «Il s'agit d'un questionnaire dont les résultats donnent un aperçu global de la situation, en plus d'offrir un comparatif avec les résultats d'une autre entreprise du même secteur d'activité, explique Mme Ducharme, associée, services-conseils en santé et en assurance collective chez Morneau Sheppel. Après avoir autoévalué ses politiques, une compagnie peut identifier les facteurs de risque, définir ses priorités et aller de l'avant avec des activités et des interventions.»

Parmi les nombreuses mesures implantées par Bell Canada, notons la formation obligatoire en santé mentale pour chacun de ses 4000 cadres. «Ils apprennent quoi dire, quelles questions poser, quelles ressources suggérer et comment supporter les problèmes, allègue Mary Deacon. En fin de compte, la durée des absences et le taux de rechute associé aux problèmes de santé mentale ont diminué.»