La ministre du Patrimoine canadien soutient que l'« exemption culturelle » contenue dans le nouveau Partenariat transpacifique protégera aussi les contenus web d'une libéralisation des marchés.

Mélanie Joly a levé jeudi une partie du voile qui recouvre toujours cette entente conclue il y a une dizaine de jours à Tokyo.

La ministre a soutenu que les négociateurs canadiens avaient réussi à étendre aux contenus sur internet la protection conférée par l'« exception culturelle » - ce qui constituerait, selon elle, une première dans les accords commerciaux signés jusqu'ici par le Canada.

Selon Mme Joly, c'est surtout l'absence d'une telle clause qui avait poussé le premier ministre Justin Trudeau à refuser de signer une entente de principe en novembre au Vietnam, ce qui avait irrité certains des partenaires.

Dans une allocution devant un regroupement de producteurs canadiens des nouveaux médias, à Ottawa, la ministre Joly a soutenu jeudi que cette protection culturelle avait été obtenue de haute lutte.

On sait encore bien peu de choses de cette entente pour renouveler le Partenariat transpacifique, conclue un an après le retrait des États-Unis du précédent accord. Les 11 autres pays signataires ont alors poursuivi les négociations pendant l'année et ils ont conclu ce nouveau « Partenariat transpacifique global et progressiste » le 23 janvier.

Les libéraux de Justin Trudeau soutiennent qu'ils ont réussi à arracher d'importantes modifications à l'accord original signé par le gouvernement conservateur de Stephen Harper en 2015, juste avant les élections générales.

Le Canada s'est assuré d'exemptions culturelles pour le contenu numérique par l'entremise de lettres signées avec chacun des autres pays impliqués dans le nouveau PTP, ce qui inclut l'Australie, le Chili, le Japon et le Brunei.

Les exemptions signifient que le Canada conserverait la capacité de formuler des lois sur le contenu numérique pour promouvoir et défendre la culture canadienne.

Simon Ross, un porte-parole pour Mme Joly, a affirmé que le Canada continuerait de défendre ses droits d'établir ses propres lois à propos de la culture canadienne si les États-Unis devaient exprimer une volonté de se joindre à l'entente de libre-échange.

« Nous avons montré au monde que nous prenons cette protection de notre culture très au sérieux », a dit M. Ross, ajoutant que les exemptions pour la culture et le patrimoine avaient été les derniers points d'achoppement réglés durant les négociations.

Michael Geist, un expert de la technologie à l'Université d'Ottawa, a affirmé que bien que des accords commerciaux antérieurs ne contenaient pas un langage spécifique sur la protection du contenu numérique, la formulation générale sur la protection culturelle se serait sans doute appliquée également au contenu en ligne.

« J'aurais été surpris de voir le gouvernement canadien prendre la position que l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) ne s'applique pas au numérique », a-t-il fait valoir.

« Il s'agit d'une exception culturelle et le moyen de diffusion serait probablement vu comme secondaire », a-t-il ajouté.

Mme Joly a aussi été appelée à commenter les critiques récentes - particulièrement en provenance du Québec - sur les investissements de 500 millions de dollars de l'entreprise californienne de vidéos en ligne Netflix pour établir un bureau au pays et financer du contenu canadien. L'annonce a été faite en septembre dans le cadre du dévoilement de la politique culturelle du gouvernement fédéral, et les détracteurs ont particulièrement souligné l'absence d'application de la taxe sur les produits et les services (TPS) sur les services de diffusion en continu.

« Il n'y a pas eu d'exemption de taxe qui a été négociée. Comme gouvernement, nous ne ferions jamais cela », a-t-elle affirmé, jeudi, lors de l'événement à Ottawa.