Face à des données multiples illustrant que l'économie retrouve de sa superbe depuis l'été dernier, la Banque du Canada adopte un ton un brin plus optimiste, sans se départir de sa légendaire prudence.

«Bien que le redressement du PIB observé dernièrement soit encourageant, il est trop tôt pour conclure que l'économie suit une trajectoire de croissance soutenable», lit-on dans le communiqué faisant part de l'annonce de son taux directeur. Comme prévu, il est reconduit à 0,5%, un taux en place depuis juillet 2015. 

La bonne prestance de l'économie en général l'amène à rehausser considérablement son scénario de croissance pour 2017. De 2,1% en janvier, le rythme d'expansion est maintenant projeté à 2,6%, ce qui situe la Banque dans le camp des optimistes au sein des prévisionnistes.  

Pour mémoire, le budget du ministre des Finances Bill Morneau est fondé sur une hypothèse de croissance de 1,9% seulement, ce qui le place dans le camp des ultra pessimistes. 

La croissance aurait été particulièrement vive au premier trimestre, selon les autorités monétaires qui estiment son rythme annualisé à 3,8%. En janvier, elles avaient misé sur 2,5%. 

L'augmentation de la prévision pour 2017 est avant tout le résultat du logement. «La contribution de l'investissement résidentiel à la croissance du PIB réel cette année devrait être beaucoup plus élevée qu'on ne l'envisageait en janvier, lit-on dans le Rapport sur la politique monétaire. Il s'agit là de la principale raison expliquant la révision à la hausse de la croissance du PIB en 2017.» 

Par la suite, le rythme devrait décélérer quelque peu. En 2018 et 2019, le rythme d'expansion est projeté à 1,9% (contre 2,1% en janvier) et à 1,8%. 

La Banque juge maintenant que l'économie tournera à plein régime dans un an environ. En janvier, elle estimait que cela surviendrait à la mi-2018. 

Ce léger devancement est la résultante de deux dynamiques : un rythme de croissance plus robuste et une diminution de l'estimation du taux de croissance potentielle. Ce taux correspond à la pleine utilisation des capacités de production jumelée à un taux d'inflation aux environs de 2%. 

Le taux de croissance potentielle est désormais évalué à 1,3% pour 2017, contre 1,5% précédemment. Cette diminution est attribuable à la faiblesse des investissements des entreprises depuis deux ans. La Banque s'attend par ailleurs à leur redressement modeste bien que les incertitudes entourant les politiques protectionnistes et fiscales de Washington dictent la prudence. 

Si le scénario de la Banque se concrétise, alors l'économie pourrait tourner au-delà de ses capacités à la fin de 2018. 

Les autorités monétaires estiment désormais qu'un taux directeur nominal neutre se situe entre 2,5% et 3,5%, soit 25 centièmes de moins que l'évaluation qui avait cours jusqu'ici. En principe, c'est le taux qui devrait être en vigueur quand l'économie tourne à plein régime. Les incertitudes pesant sur l'économie globale et canadienne et les tendances de l'inflation peuvent accélérer ou retarder quelque peu l'atteinte du taux neutre. 

Cette dernière avenue semble celle adoptée par M. Poloz et son équipe. 

«Le Conseil de direction de la Banque reconnaît la robustesse des données récentes qui est temporaire dans certains cas, et tient copte des incertitudes considérables pesant sur les perspectives, lit-on encore dans le communiqué. Dans ce contexte, le Conseil estime que la politique monétaire actuelle est encore appropriée.» 

La prochaine date d'établissement du taux directeur est le 24 mai.