Le combat des syndicats contre un projet de loi controversé qui les forcerait à rendre publique une série d'informations financières se transporte au Sénat. Sept centrales québécoises se joignent à des sénateurs libéraux, ce matin, pour dénoncer cette initiative conservatrice.

Le projet de loi C-377, parrainé par le député conservateur Russ Hiebert, vise à forcer les syndicats à déclarer les salaires de leurs employés, ainsi que toute dépense de plus de 5000$. Dans chaque cas, ils devront déclarer le nom du bénéficiaire.

L'initiative privée a été adoptée par la Chambre des communes en décembre grâce à l'appui du premier ministre Stephen Harper et malgré les objections de l'opposition et du gouvernement Marois à Québec. Mais la controverse n'a pas cessé là. L'initiative fait maintenant face à un barrage de critiques au Sénat.

Affaiblir les syndicats

La sénatrice libérale Céline Hervieux-Payette, elle-même une ancienne fonctionnaire au ministère québécois du Travail, estime que le projet de loi n'a d'autre fin que d'affaiblir les syndicats canadiens.

«La cible, c'est uniquement les syndicats et ce n'est pas fait dans le but de protéger les droits des syndiqués, dénonce Mme Hervieux-Payette, qui prendra la parole ce matin en compagnie de représentants de sept syndicats québécois. On n'a aucun indice que les syndiqués ont demandé ce genre d'intervention exhaustive.»

La sénatrice craint que le projet de loi soit ressenti encore davantage au Québec, où les travailleurs syndiqués représentent près de 40% de la main-d'oeuvre.

Le président du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), Richard Perron, qualifie d'«idéologique» le projet de loi conservateur. Il estime que la prise de position du Parti libéral du Canada - et même de certains conservateurs - prouve que l'opposition n'a rien à voir avec la fameuse «gouvernance souverainiste» que souhaitait lancer le gouvernement péquiste.

«C'est la démonstration que l'opposition à ce projet de loi au Québec n'est pas seulement motivée par des velléités souverainistes. Elle est motivée, au contraire, par la nécessité de préserver l'équilibre patronal-syndical qu'on a réussi à établir au Québec.»

M. Perron note que le sénateur conservateur Hugh Segal, proche de Brian Mulroney, a lui aussi fait connaître sa dissidence face au projet de loi C-377. Le sénateur a dénoncé que les provisions de la loi ne s'appliquent qu'aux syndicats, et non aux groupes de réflexion, congrégations religieuses, associations agricoles et organismes de charité.

Au bureau de la leader du gouvernement Harper au Sénat, Marjory LeBreton, on s'est déclaré en faveur du projet de loi C-377, sans élaborer davantage.

Les sénateurs conservateurs ont été avertis qu'ils seront rappelés au travail en plein été s'ils n'adoptent pas le projet de loi C-377, selon un reportage publié la semaine dernière.

Les centrales syndicales ont déjà annoncé leur intention de contester cette mesure devant les tribunaux.

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TAUX DE PRÉSENCE SYNDICALE EN 2011

Québec : 39,5%

Ontario : 29,9%

Reste du Canada : 28%

États-Unis : 13%

Source: Statistique Canada