«C'est un cas clair de deux poids, deux mesures: un pour un Américain noir de Chicago et un autre pour un Britannique blanc qui sort d'un pénitencier.»

La nouvelle rapportée par le Globe and Mail hier selon laquelle Conrad Black se serait vu accorder un permis de résidence temporaire au Canada a causé la colère du chef du NPD, Thomas Mulcair, au cours de la période de questions.

L'ancien magnat de la presse, qui doit finir de purger d'ici la fin de la semaine sa peine de prison pour fraude et entrave à la justice, avait renoncé à sa citoyenneté canadienne en 2001 après avoir accepté le titre de lord britannique.

Selon le quotidien torontois, l'ancien dirigeant de Hollinger International, originaire de Montréal, aurait obtenu un permis d'un an en mars dernier, qui serait valide jusqu'à mai 2013.

Le cas de Gary Freeman

Le chef du NPD, Thomas Mulcair, a comparé son dossier à celui d'un autre demandeur de résidence temporaire: Gary Freeman.

M. Freeman, Américain dans la soixantaine, était venu se réfugier au Canada dans les années 70, dans la foulée d'affrontements raciaux entre la police de Chicago et la communauté noire. Celui qui est maintenant grand-père a eu quatre enfants avec une Canadienne et a travaillé comme libraire à Toronto.

En 2004, les États-Unis ont réclamé son extradition pour avoir tiré sur un policier et l'avoir blessé, 40 ans plus tôt. Il a alors purgé près de quatre ans de détention pré-extradition au Canada. Il a ensuite plaidé coupable à des accusations de voies de faits graves et purgé 30 jours de plus aux États-Unis. Il a enfin respecté sa période de probation de deux ans à Washington.

Depuis, le gouvernement Harper refuse de lui accorder un permis pour revenir au pays. Le NPD a tenté de faire pression sur Ottawa, mais en vain.

Le ministre de l'Immigration, Jason Kenney, a refusé hier de confirmer la délivrance d'un permis de résidence temporaire à Conrad Black, au motif qu'il s'agit de renseignements personnels. «J'ai indiqué à mon ministère que je n'aurais aucune implication dans une demande de cet individu, a-t-il cependant insisté. Son application serait traitée par des fonctionnaires hautement qualifiés.»

Quant à Gary Freeman, le ministre a commencé par l'accuser d'être un «tueur de policiers». Il s'est rétracté par la suite. «Je trouve particulier que M. Mulcair ait tenté d'obtenir une intervention politique pour une personne violente et condamnée qui a tiré sur un policier et qui est un ancien membre du mouvement criminel des Black Panthers, pour qu'il soit admis au Canada», a-t-il déclaré.

M. Freeman nie avoir fait partie des Black Panthers.

Le ministre a affirmé que le caractère violent d'une condamnation passée, le cas échéant, ainsi que le risque de récidive et la menace à la sécurité canadienne étaient des facteurs pris en compte au moment de juger d'une demande de résidence temporaire.

«C'est ça, le problème avec les conservateurs: une série de règles pour les amis du régime et une série de règles pour tous les autres», a pour sa part réagi Thomas Mulcair.