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Pourquoi le bio influence-t-il le prix des aliments alors que l’on n’utilise pas d’herbicide ni d’insecticide ? Le consommateur se fait-il avoir ? – Pierre Bissonnette

Un brocoli vendu à 3,99 $ alors que son voisin biologique coûte 4,49 $. Même scénario au rayon des bananes où le fruit tropical bio est affiché à 3,28 $/kg contre 1,96 $/kg en version non bio. Vrai, à la lumière des circulaires consultées, les aliments biologiques sont souvent plus dispendieux, mais cette différence de prix s’explique par de nombreuses raisons, assurent les experts interrogés.

Le désherbage à la main nécessitant un plus grand nombre d’employés, l’utilisation restreinte des tracteurs à essence et les certifications nombreuses expliquent en grande partie pourquoi la facture d’épicerie est généralement plus élevée quand le consommateur opte pour des produits bios, souligne Catherine Lessard, agronome et directrice générale adjointe de l’Association des producteurs maraîchers du Québec.

Les coûts de production sont plus élevés pour les cultures biologiques comparativement aux cultures conventionnelles.

Catherine Lessard, agronome

« S’ajoutent à ça des coûts de certification, ce sont quelques milliers de dollars par année, souligne-t-elle. Pour de petites entreprises, ça peut représenter beaucoup. Elles vont essayer de récupérer ces coûts supplémentaires en vendant plus cher leurs produits. »

« On demande aux producteurs biologiques de s’approvisionner avec des semences biologiques, ajoute Mme Lessard, ce qui amène aussi des coûts supplémentaires. »

Et l’été en cours aura vraisemblablement donné du fil à retordre aux producteurs maraîchers, notamment ceux qui font de la culture biologique. Marie de Tarlé, directrice des affaires publiques de l’Association québécoise de la distribution de fruits et légumes (AQDFL), raconte qu’un producteur lui a confié que les pluies abondantes ont favorisé l’apparition d’un plus gros volume de mauvaises herbes cette année, augmentant ainsi les coûts reliés au désherbage. Tout doit se faire manuellement.

« Il faut réduire au maximum l’utilisation des tracteurs à essence pour limiter la contamination », rappelle-t-elle.

Ventes au détail

Ainsi, tous ces frais finissent inévitablement par se refléter sur les prix indiqués au supermarché. « C’est en partie ce qui explique la prime au détail qui fait que les consommateurs doivent payer davantage, résume Catherine Lessard. Les marges que se gardent les détaillants pour des produits biologiques sont généralement plus élevées que pour les conventionnels, surtout lorsqu’ils sont utilisés comme produits d’appel. »

Le volume acheté par les enseignes peut également faire bouger l’aiguille des prix. « C’est une question de volume d’achats, affirme Sylvie Senay, copropriétaire des 11 supermarchés Avril. Nous, on achète 100 % bio. On a un bon volume, donc on est capable d’avoir de meilleurs prix. »

Pour cette raison, Mme Senay assure que les produits vendus dans ses magasins affichent souvent un prix comparable ou moins cher par rapport au produit conventionnel offert dans les autres grandes surfaces. Vérification faite, le brocoli de chez Avril était affiché vendredi à 3,99 $. IGA, de son côté, vendait son légume vert bio à 4,49 $ en promotion et il était à 4,99 $ – également en réclame – chez Metro. Le brocoli ordinaire coûtait 3,99 $ (en promotion) chez IGA alors que les clients de Metro devaient débourser 3,69 $ (en promotion) pour le même produit.

Dans ce contexte, est-ce que le consommateur se fait « avoir » en achetant du bio ? « C’est toujours difficile à dire, répond Mme Lessard avec prudence. Ça dépend toujours de la marge que le détaillant se garde. Il y a plusieurs producteurs qui font de la vente directe ou encore qui préparent des paniers de légumes.

« C’est un mode d’achat intéressant pour le consommateur parce qu’il s’assure de payer un prix qui exclut les marges du détaillant. »

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