La légère baisse du taux annuel d’inflation, de 6,9 % en octobre à 6,8 % en novembre, est décevante et indique que le combat de la Banque du Canada contre l’augmentation des prix est loin d’être terminé.

Qu’est-ce qui maintient l’inflation à un niveau élevé ?

Malgré la baisse du prix de l’essence en novembre, d’autres composantes de l’indice des prix à la consommation (IPC) ont augmenté fortement, ce qui explique que le taux d’ensemble soit resté pratiquement inchangé, à 6,8 %. Le prix du logement a par exemple augmenté de 7,2 %, à cause de la hausse des coûts des hypothèques et des loyers. La Banque du Canada contribue donc à l’inflation en haussant les taux d’intérêt pour la combattre. L’augmentation des coûts du chauffage a aussi soutenu l’inflation dans la catégorie du logement. Surtout, le prix des aliments a contribué fortement au maintien du taux élevé d’inflation en novembre. La hausse des prix dans les épiceries, qui atteignait 11 % en octobre, est maintenant supérieure de 11,4 % d’une année sur l’autre. L’inflation dans les aliments est supérieure à l’IPC chaque mois depuis décembre 2021, souligne Statistique Canada. Les aliments sont la troisième composante en importance parmi les huit que compte l’IPC, après le logement et le transport.

Pourquoi le prix des aliments augmente-t-il plus vite que l’IPC ?

Le prix des aliments dépend de plusieurs facteurs imprévisibles et incontrôlables. Les principales causes de la hausse généralisée des prix des aliments sont le bouleversement des chaînes d’approvisionnement dû à la COVID-19, les fermetures d’usines de transformation qui ont poussé le prix de la viande à la hausse et les pénuries de main-d’œuvre, résume Statistique Canada dans une étude récente.

Les conditions météorologiques jouent aussi un rôle important. Les gels et les sécheresses aux États-Unis ont fait augmenter le prix des fruits et légumes frais et congelés au Canada. L’huile de canola a vu son prix augmenter partout dans le monde en raison d’une sécheresse au Canada, qui en est le premier exportateur mondial. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les prix des engrais et du pétrole, qui sont des intrants importants dans les cultures, ont fait augmenter le prix de la plupart des céréales. Enfin, des évènements ponctuels, comme la grippe aviaire, ont une influence sur les prix. Le prix du poulet est en hausse de 9,3 % depuis un an à cause de la réduction de l’offre due à la maladie.

Depuis un an, les huiles, le café et les œufs sont les produits alimentaires dont les prix ont le plus augmenté, selon Statistique Canada.

Y a-t-il des produits dont le prix baisse ?

L’inflation est généralisée. Parmi les huit composantes de l’indice des prix à la consommation, six étaient en hausse en novembre et seulement deux étaient en baisse, soit celle de l’habillement et des chaussures, et celle des loisirs et de la lecture.

Depuis un an, les catégories qui ont le plus contribué à l’inflation sont l’essence, l’achat de véhicules automobiles et le coût de l’intérêt hypothécaire.

Inversement, les catégories qui ont contribué à faire baisser l’inflation sur 13 mois sont le coût de l’équipement vidéo, l’immatriculation des véhicules et les services d’accès à l’internet.

Le prix de l’essence a baissé de 3,6 % d’octobre à novembre, mais il est toujours en hausse de 13,7 % depuis un an. Enfin, on commence à voir l’effet d’un retour à la normale pour certains produits, dont le prix avait beaucoup augmenté pendant la pandémie en raison des bouleversements de la chaîne d’approvisionnement. C’est le cas des meubles, dont l’augmentation du prix a considérablement ralenti à 8,1 % en novembre après des hausses supérieures à 12 % pendant huit mois consécutifs.

Est-ce qu’une autre hausse des taux d’intérêt est à venir ?

L’inflation de base, qui exclut les éléments les plus volatils de l’indice des prix à la consommation comme les aliments et l’énergie, est en hausse de 5,4 % en novembre, soit un rythme un peu plus élevé qu’en octobre (5,3 %). Les mesures de l’inflation fondamentale que suit la Banque du Canada ont également connu une accélération sur 12 mois et ont augmenté aussi en termes annualisés sur trois mois. C’est une mauvaise nouvelle pour ceux qui espéraient que le cycle de hausses du taux directeur avait pris fin en décembre.

« Les résultats de l’inflation laissent la porte ouverte à une nouvelle majoration de taux », a commenté Marc Desormeaux, économiste principal de Desjardins.

À la Banque Nationale, les économistes Matthieu Arseneau et Alexandra Ducharme admettent que le chiffre de novembre « reste élevé et constitue un niveau quelque peu inconfortable pour la banque centrale ».

La Banque du Canada aura deux autres indicateurs importants à digérer avant sa prochaine décision sur les taux, le 25 janvier. Il y aura d’abord, vendredi, les données du produit intérieur brut pour le mois d’octobre, qui s’annoncent positives, puis l’Enquête sur le marché du travail pour le mois de décembre, dont les résultats sont attendus le 6 janvier.