Comme les écureuils à l’approche de l’automne, les pays européens font des provisions d’énergie pour pouvoir passer l’hiver. La situation est critique, surtout pour l’Allemagne, principal moteur économique de l’Union européenne.

Contrairement aux écureuils, qui ont profité de l’été avant de se mettre à la tâche, l’Europe se prépare à l’hiver depuis le 23 juin. La plupart des pays membres de l’Union ont depuis cette date mis en place différentes mesures pour réduire leur consommation d’énergie afin de pouvoir se passer du gaz russe. L’augmentation des réserves de gaz naturel dans les installations de stockage fait partie de ces mesures.

Les Allemands ont fait savoir la semaine dernière que leurs installations de stockage étaient maintenant remplies à 81 %, mais même pleines à 100 %, elles ne suffiront pas à subvenir aux besoins.

Le pays, qui était le plus important importateur de gaz russe en Europe, a déclaré l’état d’alerte depuis plusieurs mois déjà. Les Russes ont réduit leurs livraisons de gaz une première fois cet été et ont annoncé un nouvel arrêt de leurs exportations pour de prétendues raisons de maintenance à compter du 31 août.

Le gouvernement allemand a dû passer à une autre étape de son plan B. Au cours des prochains jours, de nouvelles restrictions entrent en vigueur. L’éclairage public sera réduit, et les commerces devront éteindre leurs enseignes lumineuses. L’eau chaude sera coupée dans les robinets publics. La température maximale dans les bureaux sera limitée à 19 degrés Celsius, et les couloirs ne seront plus chauffés du tout.

Il n’y aura pas de police de l’énergie pour s’assurer que ces consignes soient respectées, mais s’agissant des Allemands, ce ne sera probablement pas nécessaire. Le pays est même prêt à faire plus que la réduction de 15 % de la consommation d’énergie requise par l’Union européenne.

Les entreprises allemandes, en tout cas, ont déjà commencé à économiser le gaz naturel en prévision des mois difficiles à venir.

À mesure que le temps passe, il devient évident que les mesures en place ne suffiront pas. Des coupures de courant et des arrêts de production ne pourront pas être évités, pas plus que l’explosion de la facture énergétique des ménages comme des entreprises.

Même si le chancelier Olaf Scholz recherche désespérément des sources d’énergie de rechange au Canada, en Norvège et ailleurs, il faudra probablement passer à travers quelques hivers avant que les solutions se matérialisent.

Le plan d’urgence de l’Allemagne pour assurer son approvisionnement en énergie compte trois niveaux et est actuellement au niveau 2. Le dernier niveau prévoit l’intervention du gouvernement et des décisions difficiles, comme le rationnement de l’énergie et son partage entre les besoins de la population et ceux de l’industrie. Le recours aux centrales nucléaires, que l’Allemagne avait décidé d’éliminer après le désastre de Fukushima, fait aussi partie de l’équation.

Les marchés de l’énergie anticipent déjà l’hiver catastrophique qui s’annonce. Les prix de gros de l’électricité, qui sont liés au prix du gaz naturel, atteignent maintenant des sommets incroyables en Allemagne et en France.

Les marchés de l’énergie européens viennent de connaître une semaine folle. Vendredi, le 26 août, le prix de gros du mégawattheure d’électricité pour livraison en 2023 a franchi la barre des 1000 euros (1300 $ CAD) en Allemagne et en France. Il y a un an, ce prix était de 85 euros (110,50 $ CAD) le mégawattheure.

Par comparaison, et étant donné que l’euro se transige actuellement presque à parité avec le dollar américain, le mégawattheure vaut 150 euros (150 $ US) sur le marché de gros de la Nouvelle-Angleterre, où les prix de l’électricité sont parmi les plus élevés aux États-Unis.

Même si les gouvernements de la plupart des pays d’Europe tenteront d’atténuer le choc des prix de l’énergie pour la population avec différentes mesures d’aide, l’hiver s’annonce dur pour tout le monde.

C’est vrai aussi pour les Britanniques, qui même s’ils ont quitté l’Union européenne, souffrent de la même flambée des prix du gaz naturel. Une augmentation de leur facture de gaz et d’électricité de 80 % frappera les ménages du Royaume-Uni le 1er octobre.

Compte tenu de l’aggravation de la crise énergétique, la récession n’est plus une probabilité, mais une quasi-certitude pour plusieurs pays d’Europe, y compris ses champions allemand et français.