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Bonjour. Comment se fait-il que le Canada exporte son pétrole et importe du pétrole aussi ?

René Masson

Le Canada est reconnu comme l’un des plus grands producteurs de pétrole. En 2021, le pays a exporté plus de 3,8 millions de barils de pétrole brut par jour, selon la Régie de l’énergie du Canada (REC).

Bien que le Canada soit un exportateur net de pétrole, certaines provinces ont recours à l’importation pour répondre à la demande régionale. Les exportations pétrolières du Canada s’effectuent notamment à partir de l’ouest du pays, alors que l’importation pétrolière domine dans l’Est.

Selon Pierre-Olivier Pineau, expert en politiques énergétiques à HEC Montréal, l’accès aux infrastructures pétrolières canadiennes est limité pour les provinces de l’est du Canada : le réseau d’oléoducs existant ne peut acheminer suffisamment de pétrole dans les raffineries de l’Ontario, du Québec et des provinces de l’Atlantique. Ces provinces dépendent des importations pétrolières étrangères.

À titre d’exemple, le Nouveau-Brunswick, qui n’est rattaché à aucun pipeline, a importé plus de 260 000 barils de pétrole brut par jour en 2021. Il s’agissait de plus de 50 % des importations totales de pétrole brut du pays, indique la REC.

Outre l’apport limité des oléoducs existants vers l’est du Canada, la région n’a pas les capacités de raffiner le pétrole de l’Alberta, explique Jean-Thomas Bernard, professeur de l’Université d’Ottawa spécialisé en économie de l’énergie.

Le Canada avait amorcé l’exploitation des sables bitumineux à la fin des années 1960. Inquiet de manquer de pétrole à la suite des crises pétrolières des années 1970, le pays a accru sa production, indique le spécialiste.

Le pétrole issu des sables bitumineux est un pétrole lourd qui demande un traitement spécifique. Les raffineries de l’Ontario, du Québec et des provinces de l’Atlantique ne sont pas équipées adéquatement pour traiter le pétrole lourd, souligne Jean-Thomas Bernard.

CARTE FOURNIE PAR LA RÉGIE DE L’ÉNERGIE DU CANADA

Principaux oléoducs réglementés par la Régie de l’énergie du Canada

Ainsi, les raffineries de l’est du pays, dont la raffinerie d’Irving au Nouveau-Brunswick et la raffinerie Jean-Gaulin de Valero au Québec, dépendent des importations de pétrole léger qui proviennent notamment des États-Unis et de l’Arabie saoudite.

L’exportation du pétrole de l’Alberta vers les États-Unis est fort simple : les raffineries du golfe du Mexique ont la capacité de traiter le pétrole issu des sables bitumineux, souligne Jean-Thomas Bernard. Historiquement, ces raffineries s’approvisionnaient en pétrole lourd du Venezuela, ajoute-t-il.

En 2021, les importations de produits pétroliers raffinés ont augmenté de 7 % par rapport à l’année précédente. L’Alberta est le principal importateur : la province doit importer des diluants qui sont ajoutés au pétrole lourd des sables bitumineux pour que la solution devienne « assez fluide pour être transportée par pipeline », explique Jean-Denis Charlebois, économiste en chef de la REC.

Au Québec, tout le pétrole provient aujourd’hui des États-Unis et du Canada.

La mise en service de la canalisation 9B d’Enbridge a permis à la province de s’approvisionner davantage en produits pétroliers locaux, indique L’état de l’énergie au Québec 2022, un rapport de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal.

La demande pour l’essence a atteint un sommet au Canada en 2019, selon Jean-Denis Charlebois. On observe une tendance à la baisse des importations de pétrole, qui s’explique notamment par un meilleur accès aux installations pétrolières et une transition vers les énergies renouvelables, ajoute-t-il.

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