L’inflation s’est élevée à 8,1 % en juin, un niveau jamais vu depuis janvier 1983, quand la chanson Maneater de Hall & Oats tournait en boucle à la radio, de rappeler les économistes de Desjardins.

Mais, pour la première fois en huit mois, la variation de l’Indice des prix à la consommation (IPC) s’est avérée inférieure aux attentes, qui étaient de 8,4 % sur un an.

Par rapport à mai, l’inflation progresse de 0,7 %, selon les chiffres de Statistique Canada, comparativement à des prévisions de 0,9 %.

L’essence a contribué puissamment à ce nouveau sommet. En revanche, le prix du litre est en baisse de 13 % en juillet, selon la Banque Nationale, ce qui laisse entrevoir une certaine accalmie le mois prochain.

Loin de se limiter à l’énergie, les hausses de prix demeurent généralisées. « Les prix au Canada demeurent beaucoup trop élevés, et 45 % du panier de l’IPC connaît maintenant une augmentation de plus de 7 % par année », observe le Mouvement Desjardins.

De plus, l’inflation de base, sans ses éléments les plus volatils, reste forte au goût des économistes de la Banque TD. « Le niveau élevé de l’inflation de base, en particulier, sera une source d’inquiétude et compte tenu de l’ampleur des pressions sur les prix, nous pensons que les prévisions d’inflation à long terme resteront sous pression. Le débat pour septembre devrait se situer entre des mouvements de taux d’intérêt de 50 et 75 points, et une hausse de moins de 50 points serait inacceptablement timide », écrit l’équipe menée par Andrew Kelvin, stratège en chef au Canada.

Dans le détail, les automobiles, les hôtels et les frais hypothécaires ont tous nourri l’inflation en juin. « Les coûts des intérêts hypothécaires ont augmenté de 1,4 % en juin, soit la plus forte hausse mensuelle depuis septembre 1982 », souligne Karyne Charbonneau, économiste à la CIBC, qui évoque, elle aussi, un plafonnement possible de l’inflation.

Les hausses de taux se font déjà sentir

Les hausses de taux décrétées dernièrement par la Banque du Canada ont commencé à faire sentir leurs effets sur le marché résidentiel. « Les prix de l’immobilier sont passés d’un important vent contraire à un vent contraire pour la croissance des prix », avancent Nathan Janzen et Claire Fan, du service économique de la Banque Royale du Canada.

Toujours du côté des bonnes nouvelles, la variation dans le prix des aliments a fait du surplace le mois dernier, tout en restant à un niveau élevé.

La Banque du Canada sera aux prises avec l’inflation sous-jacente qui semble se stabiliser à environ 5 %, selon les nombreux indicateurs de base. Dans ce contexte, nous nous attendons à ce que la Banque poursuive ses hausses en septembre, mais avec un mouvement plus modéré de 50 points de base à ce moment-là.

Douglas Porter, économiste en chef chez BMO

Par ailleurs, le pouvoir d’achat des ménages continue de se détériorer, les prix augmentant plus vite que le salaire horaire moyen. Celui-ci a progressé de 5,2 % au cours de la période de 12 mois se terminant en juin, a constaté Statistique Canada. « Des intentions d’embauche encore fortes dans un marché du travail tendu reflètent une demande intérieure beaucoup trop forte », indiquent Matthieu Arseneau et Alexandra Ducharme, économistes à la Banque Nationale.

L’institution penche donc pour une nouvelle hausse du taux directeur de 75 points centésimaux en septembre par la Banque du Canada, ce qui le portera à un sommet de 15 ans. Ensuite la Banque se reposera et contemplera les effets de son œuvre sur l’économie, suggère-t-elle.

Sur les marchés financiers

Le rendement des bons du Trésor s’est légèrement contracté à la publication de chiffres inférieurs aux attentes. Ainsi, le rendement des bons du Canada de 10 ans a cédé 5 points de base vers 8 h 30 mercredi pour flirter avec la ligne des 3 %. Il a ensuite remonté pour se situer à 3,12 % vers 15 h.

Selon la Banque TD, « il faut s’attendre à ce que les obligations du Canada maintiennent [leur] tendance à la baisse par rapport à celle des États-Unis ».

Depuis la fin de juin, l’écart de taux entre le Canada 10 ans et les obligations américaines de même échéance se contracte. Il est actuellement d’à peu près 12 points centésimaux.

Pour sa part, le dollar canadien est resté impassible, se vendant à 0,77 $ $ US. L’indice S&P/TSX a terminé la journée très légèrement en hausse de 82,96 points, à 19 020 points.

Principales composantes de l’IPC

Juin 2022 (variation sur un an)

  • Aliments 8,8 %
  • Logement 7,1 %
  • Dépenses courantes et ameublement 5,6 %
  • Vêtements et chaussures 2,7 %
  • Transports 16,8 %
  • Soins de santé et personnels 3,9 %
  • Loisirs et formation 6,2 %
  • Boissons, tabac, cannabis 3 %

Source : Statistique Canada

Parmi les produits les plus touchés

En juin (variation sur un an)

  • Essence 54,6 %
  • Graisses et huiles comestibles 28,8 %
  • Pâtes alimentaires 20,6 %
  • Condiments, épices, vinaigres 18,8 %
  • Laitue 18,4 %
  • Beurre 17,5 %

Source : Statistique Canada