Fait rare : patrons et syndicats ont été unanimes, mercredi, pour réclamer que la Commission de la construction du Québec soit exclue du projet de loi 4 qui renforce la gouvernance des sociétés d’État.

La CCQ n’est pas une société d’État et encore moins une société d’État comme Loto-Québec ou d’autres, ont-ils martelé.

La CCQ a pour mandat de veiller à l’application d’une loi qui encadre l’industrie, la loi R-20. Elle est responsable de l’application des conventions collectives dans l’industrie. Elle voit à la formation des travailleurs et administre le régime de retraite dans l’industrie. Son financement provient principalement des prélèvements faits auprès des travailleurs et des employeurs.

Or, le projet de loi du ministre des Finances Eric Girard aurait comme conséquence d’accroître le nombre de membres indépendants au sein du conseil d’administration de la CCQ. Il est présentement composé de cinq représentants des employeurs, cinq des travailleurs et quatre indépendants, en plus de la présidente.

En augmentant le nombre de membres indépendants, tant les employeurs que les syndicats ont l’impression d’y perdre en représentativité et en connaissance de l’industrie.

« Taxation sans représentation »

Le directeur général de l’Association des entrepreneurs en construction du Québec, Dominic Robert, a dit ne pas comprendre comment on pouvait demander aux travailleurs et aux employeurs qui financent la CCQ d’accepter que les décisions qui les concernent soient prises par des personnes qui ne proviennent pas de l’industrie.

« Tu es dans un régime de relations de travail. La base du régime, c’est la négociation collective. Et tu finances une organisation à raison de 200 millions par année, mais malheureusement, ce n’est pas toi qui vas prendre les décisions. Ça va être des personnes qui ne sont pas de ton industrie qui vont majoritairement gérer ton argent. Je sais que c’est un peu gros ce que je vais dire, mais conceptuellement, ça ressemble drôlement à de la taxation sans représentation », s’est exclamé le directeur général de l’AECQ.

Le Conseil du patronat aussi a rappelé que l’industrie de la construction est gouvernée par des règles « complexes et lourdes » reliées aux conventions collectives, à la formation professionnelle et aux avantages sociaux.

« Il y a des différences fondamentales entre la CCQ et les autres sociétés d’État assujetties à la loi », a plaidé le président et chef de la direction du CPQ, Karl Blackburn.

FTQ-Construction et International aussi

Les deux plus grandes organisations syndicales de l’industrie, la FTQ-Construction et le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International), ont aussi plaidé pour que la CCQ ne soit pas soumise à la future loi.

« Il est primordial que les acteurs du milieu aient une place prépondérante », a plaidé Michel Trépanier, président du Conseil provincial.

Si le gouvernement veut améliorer des choses à la CCQ, il y a moyen de passer par une autre voie, a plaidé Éric Boisjoly, directeur général de la FTQ-Construction. « En passant par la loi R-20, on est capable. » La loi R-20 est justement la loi qui encadre l’industrie.

La FTQ-Construction a aussi plaidé pour que non seulement les conseils d’administration des sociétés d’État fassent plus de place aux femmes — ce que prône aussi le projet de loi — mais que toute l’industrie de la construction leur fasse plus de place.

Le conseiller aux communications de la FTQ-Construction, Philippe Lapointe, a proposé que dans les contrats publics, il y ait comme condition l’embauche de femmes. « Là, vous allez faire une différence sur les chantiers », a-t-il lancé, en rappelant que le principe avait déjà été adopté pour les embauches locales de travailleurs dans les chantiers en région.