(Québec) La hausse du salaire minimum à 13,50 $ l’heure à partir de samedi au Québec fait dire à plusieurs syndicats que la mesure est nettement insuffisante pour sortir des gens de la pauvreté. Sur un autre versant, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) estime qu’il s’agit d’une « charge supplémentaire sur les épaules » de PME encore durement écorchées par la troisième vague de COVID-19.

Le gouvernement du Québec a confirmé que le taux général du salaire minimum serait porté à 13,50 $ l’heure à compter de samedi, ce qui représente une hausse de 40 cents.

Cette augmentation de 3,1 % permettra d’atteindre, pour la période 2021-2022, la cible d’un ratio de 50 % entre le taux général du salaire minimum et le salaire horaire moyen.

Le gouvernement du Québec avait laissé entrevoir en décembre dernier une telle hausse du salaire horaire minimum.

Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, estime que la hausse du taux général du salaire minimum permet d’assurer une rémunération équitable, sans nuire à l’emploi ou à la compétitivité des entreprises. À son avis, cette augmentation contribue à réduire les inégalités salariales en augmentant le pouvoir d’achat des salariés concernés, soit 287 000 personnes au Québec, dont 164 700 femmes.

D’autre part, à compter de samedi, le salaire minimum payable aux salariés rémunérés au pourboire sera de 10,80 $ l’heure, en hausse de 35 cents. D’autres catégories de travailleurs du domaine de l’agriculture profiteront aussi d’augmentations.

À quand 15 $ l’heure… ou plus ?

Cette hausse du salaire minimum est « encore trop peu » pour les travailleurs au bas de l’échelle, estime la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ).

« Qui peut espérer vivre dignement avec un salaire de 13,50 $ l’heure comme vient de l’annoncer le gouvernement ? Avec un tel salaire, il est impossible de payer son loyer, son électricité ou son épicerie et de se procurer un minimum de biens essentiels. Si M. Boulet croit réellement que c’est raisonnable, je le mets au défi, ainsi que ses collègues, de vivre sans soucis avec ce salaire ! », a déclaré vendredi par communiqué le président de la FTQ, Daniel Boyer.

La FTQ a lancé une vaste campagne pour le salaire minimum à 15 $ le 1er mai 2016. Désormais, l’organisation syndicale dit s’affairer à mettre à jour cette revendication « afin qu’elle corresponde à la réalité d’aujourd’hui, alors que les travailleurs et travailleuses font face à d’importantes augmentations du coût de la vie et des loyers aux quatre coins de la province, un niveau jamais vu ».

La coalition de la Campagne 5-10-15 soutient que le gouvernement du Québec continue de traîner de la patte alors que le gouvernement fédéral a annoncé dans son budget ce mois-ci son intention d’établir un salaire minimum fédéral de 15 $ l’heure.

La coalition, qui est composée de cinq syndicats (CSD, CSN, CSQ, SFPQ et SPGQ), du Front de défense des non-syndiquéEs et du Collectif pour un Québec sans pauvreté, parle d’une « hausse ridicule de 40 cents » du salaire minimum.

La co-porte-parole de la campagne 5-10-15, Virginie Larivière, juge qu’il s’agit d’une augmentation « nettement insuffisante pour permettre aux gens de sortir de la pauvreté ».

Ces groupes font valoir que le gouvernement a chanté les louanges des travailleurs à bas salaire comme les préposés aux bénéficiaires, le personnel d’entretien et les commis d’épicerie. Or, les primes temporaires au plus fort de la crise sanitaire ne sauraient remplacer « un salaire régulier qui permet de vivre dignement, un salaire d’au moins 15 $ l’heure », affirme la coalition.

Fardeau de plus pour les PME

En contrepartie, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) estime qu’il s’agit d’une « charge supplémentaire sur les épaules des PME ».

La FCEI s’inquiète de la nouvelle hausse du salaire minimum, et souligne que la troisième vague de COVID-19 continue de malmener les petites et moyennes entreprises (PME) et que seulement 32 % d’entre elles ont retrouvé leurs « revenus normaux ».

« Bien évidemment, il est primordial de soutenir les personnes à faible revenu, surtout en période de crise. Mais une hausse du salaire minimum aura également des impacts négatifs sur les PME », soutient le vice-président au Québec de la FCEI, François Vincent.

« Le gouvernement pourrait privilégier d’autres mesures pour lutter contre la pauvreté, comme la bonification du montant personnel de base, les primes au travail ou encore les crédits d’impôt ciblés pour les travailleurs », ajoute M. Vincent.