Comme la plupart des médias, Le Devoir connaît des jours difficiles. Le seul quotidien indépendant du Québec a enregistré l'an dernier sa deuxième perte d'exploitation consécutive.

«L'équipe de direction et le conseil d'administration ont pour principale préoccupation d'assurer la pérennité de l'institution qu'est Le Devoir. Ce n'est pas la première fois que notre journal est confronté à des difficultés. Il a su par le passé se transformer. Il le saura à nouveau», a écrit le directeur du Devoir, dans le rapport annuel de l'entreprise, déposé mercredi.

En 2014, le chiffre d'affaires du Devoir a atteint 17 millions, en baisse de 5%. L'année précédente, il avait reculé de 4,4%. Les ventes publicitaires ont plongé de 9,2% (elles avaient baissé de 6% en 2013) tandis que les revenus provenant des abonnés des éditions papier et numériques ont fléchi de 2,5% (-2,8% en 2013). Sur un an, le tirage a crû de 5,6% la semaine pour s'élever à 34 219 exemplaires, mais il a diminué de 1,6% le samedi à 54 928 exemplaires.

Pour limiter les dégâts, l'entreprise a gelé les salaires de sa centaine d'employés et mis en place un programme de départs volontaires dont se sont prévalus sept travailleurs. Au final, les dépenses ont été réduites de 3,5%.

Malgré tout, la perte d'exploitation avant dépréciation, produits financiers et impôts a fortement augmenté, s'établissant à 720 000$, contre 470 000$ en 2013. La perte nette a néanmoins diminué, passant de 1,3 million à 520 000$, l'exercice 2013 ayant été affecté par une importante radiation comptable.

Moins pire qu'ailleurs

«Ça reste une grosse perte et ça nous inquiète. Mais nous gardons le moral. Le combat du Devoir ne date pas d'hier. Le journal va survivre», a affirmé hier François Desjardins, vice-président du syndicat de la rédaction.

M. Desjardins a fait remarquer que les ventes publicitaires ont diminué de façon plus marquée dans d'autres médias, l'an dernier. La baisse a frisé les 12% chez TorStar, propriétaire du Toronto Star, et les 15% chez PostMedia, qui publie notamment le National Post et la Montreal Gazette. La Presse ne rend pas publics ses résultats financiers.

Les syndiqués fondent beaucoup d'espoir sur la nouvelle application pour tablettes électroniques, lancée l'automne dernier. En un an, le nombre d'abonnés aux différents produits numériques du Devoir est passé de 7000 à 8200.

Le journal a par ailleurs annoncé hier des changements à son site web dans le but d'accroître le partage de ses articles par le truchement des réseaux sociaux, ceux-ci étant devenus la principale source de trafic pour les sites d'information. Il n'y aura plus d'articles verrouillés, mais les lecteurs non abonnés ne pourront pas lire plus de 10 articles par mois.

Même si elles ont fondu de 400 000$ en un an, Le Devoir peut encore compter sur des liquidités de 2,9 millions. Pour bonifier ce coussin de sécurité, l'entreprise a récemment mis sur pied le fonds des «Grands amis du Devoir». L'objectif est de convaincre 200 personnes de verser 1000$ par année, et ce, pendant trois ans. Le journal pourrait ainsi récolter 600 000$. Jusqu'ici, 150 personnes se sont engagées à participer à la campagne, a indiqué hier une porte-parole du Devoir, Geneviève O'Meara.