Quatre ans jour pour jour après son lancement, la chaîne érotique Vanessa, fondée par Anne-Marie Losique, disparaîtra du paysage médiatique canadien pour faire place à une nouvelle entité.

L'entreprise annoncera ce matin un partenariat avec Vivid Entertainment, le géant américain du XXX connu entre autres pour avoir commercialisé les «sex tapes» des starlettes Kim Kardashian et Pamela Anderson. En gros, la marque Vanessa fera place à celle de Vivid TV Canada, et Mme Losique prendra la tête de cette nouvelle chaîne bilingue qui entrera en ondes le 28 octobre.

«Avec Vivid, je vais devenir la porte d'entrée de toutes les chaînes adultes au Canada», explique la femme d'affaires dans un café du Vieux-Montréal.

C'est Anne-Marie Losique elle-même qui est entrée en contact avec le coprésident de Vivid, Bill Asher, en avril dernier. «Je l'ai retrouvé sur LinkedIn, un week-end où je m'ennuyais», raconte-t-elle. Deux semaines plus tard, le duo déjeunait à Los Angeles.

Les négociations ont duré tout l'été avant d'aboutir à une entente de cinq ans à la fin du mois d'août. La Québécoise reste 100% propriétaire de son entreprise (Sex-shop TV inc., la société mère de Vanessa) et de sa licence auprès du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Elle partagera les revenus de la nouvelle entité avec Vivid, dont le chiffre d'affaires est estimé à plus de 100 millions par Forbes.

«L'entente est vraiment bien; mon futur est assuré», lance-t-elle avec son rire caractéristique.

C'est la première fois que Vivid TV, présente dans 26 pays, s'implante dans un nouveau marché avec un partenaire local. Pour Bill Asher, il importait de garder une saveur québécoise. La nouvelle chaîne offrira ainsi environ 20% de contenu local, tandis que le reste proviendra de l'immense banque de productions de Vivid.

«Ce qu'on ne voulait pas faire, c'est de faire comme on voit souvent et d'arriver avec un produit 100% américain; on sait que ça ne fonctionnerait pas chez vous», dit M. Asher, joint à son domicile de Los Angeles.

Le producteur se rappelle très bien le premier appel d'Anne-Marie Losique, au printemps dernier. «Le moment était parfait, car on soupesait les occasions d'affaires dans le marché canadien. Disons qu'elle n'est pas gênée du tout! Elle nous a exposé de façon très directe son plan de match, ses idées.»

Pas de regrets

Anne-Marie Losique dit n'avoir aucun regret par rapport au lancement de sa chaîne Vanessa en 2010, que certains ont perçu comme un échec. Elle admet avoir dû effectuer une restructuration majeure en 2012, délaissant la production de contenu maison pour se concentrer sur la diffusion.

«Je n'ai pas tendance à expliquer outre mesure dans la vie, dit-elle. Quand j'ai fermé la production, ça a soulevé des questions. Tout va bien: on a eu une restructuration, mais je n'ai jamais été au bord de la faillite.»

Mme Losique affirme que Vanessa a atteint la rentabilité à sa troisième année d'exercice. Le remaniement de 2012 et l'arrivée de la vidéo sur demande - dont les revenus s'additionnent à ceux des abonnements mensuels - ont marqué une grande différence, soutient-elle.

Anne-Marie Losique gardera son équipe en place et elle se réjouit de pouvoir compter sur les ressources de Vivid. «Je n'ai jamais eu ça, une grosse structure, avec un relationniste à New York. J'ai toujours été seule dans mon coin. Quand tu es petit, tu te sens plus fragile, tu sens que tout pourrait s'écrouler.»

Sex-shop TV inc., qui compte une demi-douzaine d'employés, déménagera sous peu dans de nouveaux bureaux, à deux pas du square Victoria.

Le postérieur de Pippa Middelton a fait jaser le monde entier au mariage royal de sa soeur Kate. Quelques jours plus tard, Vivid Entertainment lui envoyait une offre de 5 millions de dollars pour tourner dans un film porno. Celle-ci a refusé, mais plusieurs autres starlettes ont accepté au fil des ans. C'est avec des offres du genre que Vivid a créé de toutes pièces le phénomène très populaire des «sex tapes», soit ces films XXX mettant en vedette des célébrités. Le plus connu est sans doute celui de Kim Kardashian, diffusé en 2007. «Avant ce film, personne ne savait qui elle était, ensuite elle est devenue une véritable star mondiale», dit Bill Asher, coprésident de Vivid. Kim Kardashian aurait empoché 5 millions grâce à cette vidéo. Et Vivid... plusieurs fois cette somme.