Dévastatrice à Waterloo, en Ontario, la chute de BlackBerry (T.BB), malgré son statut de phare, ne serait pas insurmontable pour le secteur canadien des technologies de l'information, selon divers intervenants interrogés hier à ce sujet. Et encore moins au Québec.

Les difficultés éprouvées par BlackBerry, qui a à peu de choses près confirmé sa mise en vente lundi, ne sont pas sans rappeler celles vécues il y a quelques années par une autre ambassadrice technologique canadienne, Nortel.

Mais si elles font craindre le pire à Waterloo, où l'entreprise occupe une place importante dans l'économie locale, leur incidence risque d'être nettement moins grande au Québec.

«Ce ne sera pas Nortel, qui avait des usines et des milliers d'employés ici, estime Jean-Guy Rens, directeur québécois de l'Alliance canadienne pour les technologies avancées (CATA). Ce qui était grave aussi avec Nortel, ce sont les sous-traitants. Or, je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de sous-traitants de BlackBerry au Québec. Peut-être quelques développeurs d'applications pour leur écosystème, mais je ne crois pas que l'on puisse vraiment parler de sous-traitants.»

À l'échelle canadienne, BlackBerry "était un gros joueur qui apportait de la recherche, un peu comme Bombardier et son réseau de fournisseurs ici», explique pour sa part Patrice-Guy Martin, PDG du Réseau Action-TI.

Il y a moyen, en prenant garde, d'assurer une transition ordonnée, croit John Reid, PDG de CATA. «BlackBerry a été un citoyen corporatif responsable, qui a aidé à renforcer le système d'éducation à Waterloo et Kitchener, elle a créé des gestionnaires talentueux, dit-il. Ce talent reste dans l'économie et peut créer ou aider de nouvelles entreprises.»

Si BlackBerry devait bel et bien disparaître, c'est probablement sur les épaules d'OpenText, une firme de logiciels de gestion de documents pour les entreprises elle aussi basée à Waterloo, que reposerait le titre de porte-étendard de l'industrie canadienne des technologies, selon M. Reid.

«Il y a aussi des entreprises étrangères qui ont une présence importante au Canada, qui y font de la recherche et du développement significatifs. Ericsson en est un bon exemple à Montréal.»

De l'avis de M. Reid, l'occasion serait belle pour le Canada de réfléchir à la façon de mieux préserver et créer des entreprises porte-étendards. Il pointe notamment du doigt la lenteur des provinces canadiennes à accepter le financement participatif donnant droit à des actions.

«Il faut penser à la vitesse à laquelle nous adoptons les changements du XXIe siècle.»