Gaëlle Généreux et Émilie Nollet se coupent mutuellement la parole quand elles parlent de la grève étudiante du printemps dernier. La première étudie à la maîtrise en études organisationnelles; la deuxième, au doctorat en management. Elles s'emballent toutes les deux quand elles évoquent les échanges musclés du printemps érable, qu'elles ont tenté d'inviter entre les murs de HEC Montréal.

Leur but? Organiser une assemblée générale extraordinaire pour discuter de la grève avec les étudiants membres de l'Association étudiante de la maîtrise et du doctorat (AEMD). Leur mission? Recueillir 100 signatures en trois jours pour y parvenir. La tâche était titanesque.

«Le 22 mars approchait et on ne connaissait toujours pas la position de HEC», se rappelle Émilie, titulaire d'un baccalauréat en langues et géographie. Gaëlle renchérit. «Personne ne se posait la question. Tout le monde tenait pour acquis que le HEC était contre la grève et pour la hausse des droits de scolarité, observe-t-elle. On voulait créer un espace de discussion.»

Mission accomplie pour les deux jeunes femmes, qui sont parvenues à récolter les signatures nécessaires après avoir arpenté les couloirs de leur université. «Certaines personnes étaient cyniques, d'autres étaient heureuses qu'on parle du conflit», affirme Émilie.

L'assemblée n'a pas été facile et la discussion, évacuée. Les participants de l'assemblée en avaient assez des longues joutes verbales et un vote électronique a été privilégié, indiquent les étudiantes.

Au final, les classes ont été suspendues de midi à 18h30, le 22 mars, pour les étudiants de deuxième cycle. Dans une école où les levées de cours se comptent sur les doigts d'une main, ce n'était pas une mince affaire. HEC Montréal a choisi de maintenir les cours, assurant dans un courriel qu'il respectait la liberté d'expression de ses étudiants «sur les enjeux de l'heure dans notre société». L'ultime décision de donner un cours, ou non, revenait aux professeurs.

Cette journée-là, Émilie s'est rendue à l'école avec une affiche sur laquelle elle avait inscrit «Pouvons-nous discuter de la chose (svp)?». Un gardien de sécurité l'a empêchée d'entrer dans l'école. «Ce n'est pas facile de mener le combat, admet-elle. Mais la réciprocité est là. On échange des points de vue, et c'est comme ça qu'on va mener la réflexion plus loin.»

Quelques jours plus tard, le 5 avril, des milliers de criquets ont été relâchés dans un immeuble de HEC. Selon Gaëlle, qui a terminé des études de premier cycle en anthropologie, cette action a nui aux efforts de son petit groupe de militants. «J'étais tellement fâchée, lance-t-elle sur un ton excédé. J'ai été insultée que ces gens-là ne prennent même pas la peine de venir voir tout le travail qu'on avait dans les semaines précédentes. On n'est pas tous pareils.»