Le géant des médias News Corps a confirmé jeudi qu'il allait se scinder en deux, avec d'un côté la presse et l'édition, de l'autre l'audiovisuel, se disant sous-évalué en Bourse et niant tout lien avec le scandale des écoutes qui plombe le groupe depuis un an.

«Nous pensons que c'est la bonne chose à faire pour l'entreprise à l'avenir», pour pouvoir investir, «avoir plus de flexibilité» et «voir notre valeur reconnue pleinement» par les investisseurs, a argumenté le patron et fondateur de News Corp, Rupert Murdoch, lors d'une conférence d'analystes.

«Nous ne faisons cela en aucune manière en réaction à ce qui se passe en Grande-Bretagne», a-t-il assuré en référence au scandale des écoutes, insistant sur le fait que les dirigeants du groupe réfléchissaient à une scission depuis trois ans.

L'été dernier les révélations selon lesquelles le tabloïde britannique News of the World avait écouté illégalement les conversations de dizaines de personnes pour avoir des scoops, avaient entraîné la fermeture de cet ex-fleuron de l'empire Murdoch.

Ce scandale a sali la réputation du groupe et mis en péril le projet d'acquisition de la totalité de la chaîne câblée britannique BSkyB, dont News Corp détient actuellement 39%.

Cette scission est «un grand pas et une très grande décision pour moi» a reconnu le magnat américano-australien, que l'on disait réticent à une telle solution, et qui compte présider les conseils d'administration respectifs des deux sociétés envisagées.

Les actionnaires actuels de News Corp. recevront une action de chacune des deux nouvelles compagnies pour tout titre actuel.

Le capital des deux nouvelles sociétés restera constitué d'actions de type «A» et de type «B», ces dernières seules disposant d'un droit de vote en assemblée générale: une structure critiquée qui permet à la famille Murdoch de contrôler le groupe malgré la faiblesse relative de sa participation.

Rupert Murdoch sera PDG de la nouvelle société recentrée sur le cinéma et la télévision. Il sera assisté de son fidèle lieutenant Chase Carey, qui occupera la fonction de directeur d'exploitation.

De loin la plus importante des deux, cette société devrait générer des ventes de l'ordre de 23,5 milliards de dollars. Elle comprendra le réseau Fox, les studios 20th Century Fox et des réseaux câblés (Sky Italia, BSkyB).

L'activité presse, avec un chiffre d'affaires de 8,8 milliards de dollars, coiffera une pléiade de journaux internationaux, dont le Wall Street Journal et le Times de Londres, l'agence de presse financière Dow Jones et la maison d'édition Harper Collins. Le groupe ne précise pas qui en assurera la direction opérationnelle.

À un analyste qui lui demandait pourquoi il croyait au potentiel de rentabilité d'un groupe dédié uniquement à la presse et l'édition au moment où de nombreux journaux mettent la clé sous la porte, il a réaffirmé sa foi dans les revenus «numériques» provenant de la lecture en ligne et sur les appareils mobiles.

Il a aussi qualifié l'information de «matière première avec le plus de valeur» dans un monde «devenu de plus en plus complexe».

Le groupe espère boucler l'opération dans les 12 mois. Le conseil d'administration, qui a approuvé le principe de la séparation, doit encore en valider le plan détaillé tout comme les actionnaires qui seront réunis en assemblée générale, mais «pas avant le premier semestre 2013».

«Il reste beaucoup d'étapes» a souligné le groupe, précisant qu'il n'y avait «nulle certitude» que ce projet aboutisse.

L'action reculait de 0,72% à 22,13$ en début de séance.

La scission «aiderait Chase Carey à se focaliser sur les actifs de divertissement sans être distrait par le scandale des écoutes» et permettrait notamment d'allouer tous les coûts juridiques liés à l'affaire à la société d'édition seule, remarque la maison de courtage Miller Tabak.

Certains analystes ont toutefois exprimé la crainte que les deux groupes perdent en synergies et se fassent concurrence au lieu de partager leurs ressources.