La zone euro a échappé de peu à la récession au premier trimestre, sans pour autant dissiper les craintes pour la croissance, un sujet qui devrait être au coeur des discussions mardi entre le nouveau président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel.

Selon une première estimation publiée mardi par l'office européen de statistiques Eurostat, la zone euro a enregistré une croissance nulle (0,0%) au cours des trois premiers mois de l'année, après une baisse de son PIB de 0,3% au trimestre précédent.

Ce chiffre, meilleur que prévu par les analystes (-0,2%), permet à la zone euro d'échapper de justesse à la récession, qui est constatée lorsque le PIB se contracte pendant deux trimestres consécutifs.

Mais il cache surtout des disparités importantes entre pays de la zone euro: alors que l'Allemagne a vu son PIB progresser de 0,5%, dépassant toutes les attentes, grâce aux exportations et à la consommation, la France a connu une croissance nulle (0%) et l'Italie s'est enfoncée dans la récession (-0,8%).

Les Pays-Bas ont eux aussi enregistré une mauvaise performance (-0,2%). Quant à la Grèce, elle a enregistré une chute du PIB de 6,2% au premier trimestre, selon une première estimation officielle.

Ces disparités montrent que «la région reste très dépendante de l'Allemagne», souligne Jennifer McKeown, de Capital Economics. «Un grand merci à la progression meilleure que prévu du PIB allemand», renchérit Martin Van Vliet d'ING.

Les chiffres publiés mardi devraient en tout cas contribuer à alimenter le débat sur la croissance en Europe, sujet qui s'est imposé peu à peu face au tout austérité, notamment sous l'impulsion du président français François Hollande.

Ce dernier a rappelé sa position sur la question lors de son discours d'investiture mardi matin à l'Élysée. «À nos partenaires, je proposerai un nouveau pacte qui alliera la réduction nécessaire des dettes publiques avec l'indispensable stimulation de l'économie», a-t-il affirmé.

«Pour surmonter la crise qui la frappe», a-t-il souligné, «l'Europe a besoin de projets, elle a besoin de solidarité, elle a besoin de croissance».

Le sujet devrait être au coeur de ses discussions mardi après-midi à Berlin avec la chancelière Angela Merkel, principale avocate de la rigueur budgétaire en Europe, qui a accueilli avec réticence sa proposition d'ajouter un volet croissance au traité budgétaire européen.

Les moyens de relancer la croissance européenne constitueront aussi le thème principal du dîner qui réunira les dirigeants européens à Bruxelles le 23 mai.

Le chef du gouvernement italien, Mario Monti, a proposé la semaine dernière de «coaliser les bonnes volontés» pour faire en sorte qu'elle soit «compatible» avec la consolidation budgétaire.

Il doit s'entretenir mardi à Bruxelles avec le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, dont les propositions en faveur de la croissance (moyens accrus pour la Banque européenne d'investissement, financement de grands projets européens, taxe sur les transactions financières, meilleure utilisation des fonds européens) sont largement partagées par M. Hollande.

Les dirigeants européens vont en tout cas devoir faire preuve d'initiative pour faire mentir les prévisions des analystes.

Pour Martin Van Vliet, il n'y a «aucun signe de rebond économique solide et durable à l'horizon pour la zone euro».

Quant à Howard Archer, d'IHS Global Insight, il pense qu'«une contraction du PIB sera vraisemblablement au menu au deuxième trimestre».

Même si un retour progressif à la croissance est attendu en fin d'année, «une nouvelle escalade de la crise de la dette, sans compter une sortie de la Grèce (de la zone euro), pourraient faire dérailler la reprise attendue», met en garde M. Van Vliet.