Malgré les efforts de la Réserve fédérale (Fed), les taux des obligations à long terme américains ont augmenté pour la sixième journée d'affilée hier.

Pour les porteurs d'obligations, cela représente un rendement en baisse alors que, pour Washington, cela indique que les financements de la dette arrivée à échéance et du déficit courant coûteront plus cher.

Le 28 janvier, le taux des obligations venant à terme en 2021 s'élevait à 3,32%.

Hier, il a atteint 3,69% avant de se replier quelque peu. L'écart entre les rendements des obligations 2 ans et 10 ans a atteint 2,89 points de pourcentage, alors que l'écart médian était de 1,81 point au cours de la dernière décennie, selon les données de l'agence Bloomberg. Une courbe de rendement plus pentue reflète l'optimisme des investisseurs envers l'économie.

L'été dernier, alors que les investisseurs craignaient une rechute de l'économie américaine en récession assortie de déflation, le taux des 10 ans était descendu jusqu'à 2,51%.

«Les taux sont en train de s'aligner avec les perspectives d'inflation, de croissance et de finances publiques, explique Michel Doucet, vice-président de Valeurs mobilières Desjardins. L'économie est en reprise, les consommateurs reprennent un peu confiance et les finances publiques se dégradent.»

«Une meilleure création d'emplois et une reprise du crédit bancaire militeront en faveur d'une hausse des taux, écrivait la semaine dernière Paul-André Pinsonnault, économiste principal à la Banque Nationale, dans le dernier numéro du Mensuel obligataire. Nous pensons toujours que celui de 10 ans dépassera 4% d'ici la fin de l'année.»

L'offre de Treasuries ne cesse d'augmenter. Cette semaine seulement, Washington en émettra pour 72 milliards US, dont 24 milliards US qui viendront à échéance en 2021. Devant pareille avalanche, les investisseurs se montrent naturellement plus exigeants, même si la Réserve fédérale achète beaucoup dans le cadre de sa deuxième phase de détente quantitative (DQ2) qui vise à stimuler l'économie en diminuant le loyer de l'argent. On s'attend à ce qu'elle en achète pour de 7 à 9 milliards US cette semaine.

La Fed n'achète pas directement du Trésor américain, un privilège réservé à une vingtaine de grands courtiers. Elle recherche néanmoins des titres émis depuis peu, de manière à soulager ces grands courtiers et à inciter les investisseurs à se tourner vers les obligations d'entreprises ou des titres adossés à des créances hypothécaires.

Selon une compilation de Bank of America Merrill Lynch, 40% des achats de la Fed portaient sur des émissions de moins de 90 jours, en janvier, comparativement à 20% en décembre et à 15% en novembre quand a été annoncée la DQ2 qui doit s'échelonner jusqu'en juin et atteindre quelque 600 milliards US. Cette somme représente grosso modo la taille du déficit du gouvernement américain durant la période.

Depuis le début de la DQ2, les achats de la Fed se montent 288 milliards US. Elle détient désormais 896,7 milliards US de Treasuries et dépasse désormais la Chine comme premier créancier des États-Unis.

En acquérant massivement des obligations du Trésor tandis que l'économie montre des signes de guérison, la Fed incite aussi les investisseurs à de tourner vers des actifs plus risqués. Depuis le 3 novembre, le taux des obligations de 10 ans a augmenté d'un point de pourcentage alors que le maître indice Standard&Poor's avançait de 9,4%.