C'est une grande victoire pour Theratechnologies (T.TH). Un comité spécial des autorités américaines a jugé de façon unanime hier que le produit de la biotech montréalaise méritait d'être mis sur le marché, ce qui place l'entreprise aux portes de la commercialisation.

Un comité de la Food and Drug Administration (FDA), chien de garde du marché américain, a voté à 16 contre 0 hier pour l'approbation de la tésamoréline, aussi connue sous le nom d'Egrifta. Ce produit a été développé par Theratechnologies pour traiter la lipodystrophie, qui affecte les patients atteints du VIH en modifiant la répartition des graisses dans le corps.

Tout n'est cependant pas encore gagné pour Theratechnologies, puisque la FDA ne rendra sa décision finale que dans deux mois. Les recommandations du comité spécial, formé de médecins indépendants et de représentants de patients, pèsent toutefois habituellement lourd dans la balance.

«On était confiant que c'était pour bien aller. Mais 16 à 0, je ne vous mens pas... C'est bingo!» s'est exclamé Yves Rosconi, président et chef de la direction de Theratechnologies, joint à Washington.

«Nous sommes bien contents et très optimistes pour la suite des choses», a-t-il confié à La Presse Affaires, refusant toutefois de vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

«C'est une grosse étape, mais c'est loin d'être terminé. Il reste deux mois pendant lesquels nous allons continuer à faire avancer le dossier avec la FDA», a-t-il dit.

Selon l'analyste Jason Zhang, de BMO Marchés des capitaux, ce vote vient «augmenter significativement les chances d'approbation» de la tésamoréline.

«Nous nous attendions à un vote positif, nous nous n'avions pas prévu qu'il serait unanime», a écrit hier l'analyste dans une note aux investisseurs.

Les transactions sur le titre de Theratechnologies avaient été interrompues, hier, en raison du vote de la FDA.

M. Zhang prévoit que les investisseurs réagiront «très positivement» au résultat du vote dès l'ouverture des marchés, aujourd'hui.

Theratechnologies est l'une des très rares entreprises québécoises à se retrouver ainsi aux portes de la commercialisation. L'entreprise a investi 13 ans d'efforts et près de 200 millions de dollars dans le développement de la tésamoréline.

Le vote d'hier signifie que tous les membres du comité estiment que les bénéfices de la tésamoréline l'emportent sur les risques qu'elle pourrait causer. Mardi, un document rendu public par la FDA qui suggérait que la molécule pouvait causer le diabète avait semé la panique chez les investisseurs, qui avaient largué massivement leurs actions de Theratechnologies. Le titre avait perdu 56% de sa valeur en un jour, avant de rebondir de près de 40% le lendemain.

«Comme nous le pensions, le comité a minimisé en grande partie les risques de diabète, les jugeant faibles et possibles à gérer», écrit l'analyste Jason Zhang, qui estime toutefois qu'ils mériteront d'être étudiés dans l'avenir.

La seule ombre au tableau réside dans les bénéfices de la tésamoréline sur la santé cardiovasculaire des patients. La lipodystrophie est connue pour creuser les joues et provoquer une accumulation de gras au niveau de l'abdomen.

L'efficacité de la tésamoréline a été évaluée en mesurant la réduction de la graisse abdominale. Les membres du comité ne se sont toutefois pas montrés convaincus que ce bénéfice implique nécessairement une amélioration de la santé cardiovasculaire des patients, même s'ils conviennent qu'elle améliore leur qualité de vie.

Selon l'analyste Jason Zhang, il est possible que la FDA se montre «dure» et exige des données supplémentaires qui pourraient retarder l'approbation du futur médicament.

Theratechnologies a conclu une entente avec la multinationale EMD Serono pour une éventuelle commercialisation de la tésamoréline aux États-Unis si elle est approuvée.

En cas de feu vert en juillet, Theratechnologies recevra des paiements de Serono qui, selon le patron, Yves Rosconi, permettront de couvrir l'ensemble des dépenses de 24 millions de dollars engendrés en cours d'année par la biotech montréalaise.

Selon les différents analystes, le potentiel de vente de la tésamoréline se situe quelque part entre 150 et 400 millions US par année. Theratechnologies recueillerait en moyenne un peu plus de 20% de ces sommes grâce à des redevances versées par Serono.

En cas d'approbation aux États-Unis, M. Rosconi a indiqué hier à La Presse Affaires que sa priorité sera ensuite de faire approuver le médicament dans d'autres marchés, notamment en Europe et au Moyen-Orient.