La métamorphose de Pittsburgh, qui est passé de symbole de délabrement urbain à centre de haute technologie et de services de santé, pourrait offrir certaines leçons aux ministres des finances du G20 qui se réunissent dans la ville à compter d'aujourd'hui. Mais les problèmes financiers persistants de Pittsburgh ont aussi de quoi les faire réfléchir.

Pittsburgh a survécu à l'implosion de sa principale industrie, l'acier, et à la perte d'une génération de travailleurs. Son taux de chômage (7,8%) est près de deux points de pourcentage sous la moyenne nationale et il est faible parmi les grandes villes américaines. Son taux de saisies de maisons est l'un des plus faibles du pays.

Ces victoires sont toutefois tempérées par le fait que les finances de Pittsburgh demeurent sous le contrôle effectif de l'État de Pennsylvanie, la ville étant aux prises avec un manque de près de 1 milliard US au chapitre des pensions et de ses obligations, un héritage de sa douloureuse transformation.

«Le message de Pittsburgh est qu'on peut se remettre d'un recul économique d'importance grâce à du soutien et au leadership qui convient», assure Harold Miller, président de Future Strategies, un cabinet de consultants pour entreprises établi à Pittsburgh. «L'autre leçon de Pittsburgh, ajoute-t-il, est celle-ci: ne tentez pas de vous accrocher trop longtemps ou d'attendre de retrouver ce que vous avez perdu pour vous remettre sur les rails.»

Pittsburgh a été anéanti lorsque la concurrence venue de l'étranger, des nouvelles technologies et une récession nationale se sont combinées pour faire presque disparaître l'industrie de l'acier de la région dans les années 80. De 1981 à 1984, Pittsburgh a perdu 120 000 emplois dans le secteur manufacturier.

«C'est beaucoup d'emplois en peu de temps et dans une base industrielle non diversifiée», observe Christopher Briem, un économiste du Center for Social and Urban Research de l'Université de Pittsburgh. «Il n'y avait rien pour contrer le ralentissement économique, ajoute-t-il. Cela a créé une grande migration vers ailleurs.»

Ce sont les travailleurs dans la vingtaine et la trentaine qui ont été les plus affectés. Plus de 50 000 d'entre eux ont quitté au milieu de la décennie, un formidable déplacement démographique qui se fait encore sentir. Pittsburgh est la seule grande région métropolitaine des États-Unis où le nombre de décès excède celui des naissances chaque année, selon le Census Bureau.

«Ils ont emmené avec eux leurs familles et leurs futures familles, dit M. Briem. Toute une génération de personnes entre 20 ans et 40 ans. Nous avons perdu non seulement des tas de gens, mais les personnes qui étaient les mieux à même de prendre en charge les nouvelles industries et d'acquérir de nouvelles habiletés.»

La renaissance de Pittsburgh fut le résultat d'un «mélange de certaines circonstances fortuites, de stratégie et de chance», selon M. Miller, de Future Strategies.

La chance: l'Université de Pittsburgh et l'Université Carnegie Mellon ont fourni des talents essentiels en recherches et ont servi d'incubateurs d'entreprises. En outre, Pittsburgh disposait d'un important centre de services de santé, un héritage des aciéries qui favorisaient par leur présence une société au sein de laquelle on demeurait du berceau jusqu'au tombeau. Et puis, Carnegie Mellon fut un pionnier dans l'étude de la robotique.

Ainsi, en 1987, RedZone Robotics Inc. a essaimé de Carnegie Mellon et ses machines permettent aux villes d'inspecter les tuyaux d'égout pour vérifier s'ils présentent des dommages mais sans qu'on ait besoin de creuser pour ce faire. «Pittsburgh est un exemple de ce qu'on peut réussir à faire», affirme Paul O'Neill, ex-président d'Alcoa et ancien trésorier dans l'administration George W. Bush.