La possibilité d'un relent de protectionnisme américain hantait les participants de la Conférence de Montréal qui se sont lancés dans de vibrants plaidoyers en faveur du libre-échange.

«La meilleure façon de protéger des emplois, c'est d'ouvrir les portes à l'investissement direct étranger (IDE), a martelé le président de la Colombie, Avaro Uribe Vélez. Sans l'IDE, l'investissement intérieur ne peut progresser.»

Pour sa visite non officielle, le président colombien était entouré d'un fort dispositif de sécurité, orchestré à la fois par la GRC et par ses propres gardes. Devant l'hôtel où se tient la conférence, plusieurs manifestants de la diaspora colombienne dénonçaient la venue d'un élu qui, à leurs yeux, bafoue les droits de la personne.

Dans son allocution, brièvement interrompu par un manifestant, le président a fermement défendu le bilan de ses deux mandats à la présidence, axés sur le rétablissement d'un État de droit et du monopole des juges dans l'administration de la justice, sur le désarmement des Forces armées révolutionnaires de Colombie et des milices paramilitaires.

Il a réitéré son vif désir que soit ratifié par Ottawa l'accord de libre-échange négocié entre les deux pays.

Stockwell Day, ministre canadien du Commerce international, a pour sa part précisé devant la presse que ledit accord tient compte du respect des droits humains. «Nous sommes confiants de voir des améliorations de ces droits en Colombie.»

Prenant la parole durant la conférence avant M. Uribe, M. Day avait expliqué que les réflexes protectionnistes sont normaux en période de récession, mais dangereux. «Si nous voulons vraiment protéger les emplois, les entreprises et les travailleurs, il faut ouvrir les portes aux opportunités. Si le protectionnisme existe dans un pays, il va se multiplier dans d'autres pays.»

Il est revenu devant les journalistes sur les inquiétudes suscitées par l'application de l'American Recovery and Reinvestment Act (ARRA) et sur l'importance d'apporter un addendum à l'Accord de libre-échange. Quand? «Au plus tôt (immediate). Cela ne peut attendre. Nous avons déjà quelques cas d'entreprises» dont les propositions ont été écartées.

Parallèlement à Washington, les géants des télécoms Cisco Systems et Alcatel-Lucent réclamaient la levée des dispositions Buy American contenues dans l'ARRA. Elles sont susceptibles de ralentir les projets que les stimulants de 787 milliards US étaient sensés accélérer parce que les réseaux de télécommunications contiennent des pièces qui viennent de partout dans le monde, selon les équipementiers.

Ces dispositions fixées par le Congrès précisent que les fonds de l'ARRA ne peuvent pas en règle générale être utilisés pour des biens non manufacturés aux États-Unis.

Partenariat Europe-Canada

À Montréal, M. Day partageait la tribune avec la commissaire au commerce extérieur de la Commission européenne, Catherine Ashton.

Sa visite marquait le coup d'envoi des négociations entre l'Europe et le Canada en vue de la conclusion d'un partenariat économique qui irait plus loin qu'un simple accord de libre-échange. Il pourrait ainsi inclure les droits sur la propriété intellectuelle. «Tout est sur la table au départ, mais nous sommes conscients qu'il existe des sensibilités de part et d'autre», a-t-elle dit, se refusant à toute précision sinon le rappel que l'échéancier pour en arriver à un accord est de deux ans.

Dans son allocution en plénière, lady Ashton a rappelé la volonté de l'Europe de bâtir des institutions transfrontalières pour éviter une nouvelle crise financière et économique comme celle que nous traversons.

Elle a surtout adressé indirectement une critique aux élus américains. «Il faut s'assurer que les programmes de sauvetage économique ne fassent pas obstacle au commerce», a-t-elle plaidé.

Elle a aussi souligné que l'ouverture des marchés au commerce et à l'investissement était un bon moyen de stimuler la relance économique, rappelant qu'il avait été le moteur de la croissance durant 15 ans avant la récession.

Elle a aussi salué les négociations en cours entre le Canada et l'Europe. La conclusion d'un partenariat pourrait représenter un accroissement des échanges transatlantiques de 30 milliards par année.

L'Europe, a-t-elle ajouté, reste la deuxième source d'investissement étranger direct dans le monde.

Avec Bloomberg