La 14e Conférence de Montréal, qui réunit plusieurs décideurs internationaux d'envergure, a pris son envol hier matin.

La 14e Conférence de Montréal, qui réunit plusieurs décideurs internationaux d'envergure, a pris son envol hier matin.

Au nombre des conférenciers attendus dans la métropole: Paul Volcker, Dominique Strauss-Kahn, Henry Kissinger, ainsi que Michelle Bachelet, présidente du Chili.

Plusieurs personnalités du milieu financier et politique québécois participent à la conférence, dont le premier ministre Jean Charest et Paul Desmarais jr, président du conseil et co-chef de la direction de Power Corporation du Canada. La conférence se termine jeudi.

Même s'ils reçoivent un meilleur accueil dans le monde occidental, les fonds souverains ont conservé leur aura de mystère.

«On ne sait rien (sur eux). Aucun élément de leur stratégie n'est public. Ce sont des boîtes noires», dit Antoine de Salins, membre du directoire du Fonds de réserve pour les retraites en France.

En 2005, la méfiance envers les fonds souverains - le véhicule d'investissement par excellence des États, particulièrement les pays producteurs de pétrole - a fait échouer l'achat de cinq ports américains par le fonds souverain des Émirats arabes unis. Les opposants à la transaction invoquaient des craintes relatives à la sécurité nationale.

Cette méfiance est de moins en moins justifiée, estimaient hier la plupart des participants à un débat sur les fonds souverains dans le cadre de la Conférence de Montréal. «Les fonds souverains voient même davantage à long terme que les fonds d'investissement privés», dit Dominique Senequier, présidente du directoire de Axa Private Equity, une firme d'investissement privée.

Le gestionnaire américain Orin Kramer va plus loin: les fonds souverains sont des investisseurs plus responsables que bien des caisses de retraite. «Les fonds souverains se comportent probablement mieux que la moyenne des caisses de retraite aux États-Unis, notamment parce que leurs décisions sont davantage basées sur le rendement», dit le président de la caisse de retraite des employés de l'État du New Jersey.

«Plus un pays est démocratique, plus il y a de la pression politique sur ses fonds d'investissement. Si on attache un rôle de développement économique aux caisses de retraite, on les rapproche drôlement des fonds souverains», ajoute Yvan Allaire, président du conseil d'administration de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques.

Afin d'atténuer les critiques à l'égard des fonds souverains, Yvan Allaire propose de leur enlever leur droit de vote. Une suggestion qui ne fait pas l'unanimité au sein des conférenciers. «Comme caisse de retraite, nous n'abandonnerions jamais notre droit de vote. Pourquoi eux le feraient-ils?» demande Orin Kramer.

De toute façon, le monde financier finira bien par se rendre compte de la nécessité des fonds souverains, croit le gestionnaire américain. «Nous avons besoin d'argent, et ils (les pays qui ont des fonds souverains) ont l'argent. Si les gens n'aiment pas ça, ils auraient dû forcer leurs gouvernements à adopter une politique énergétique qui n'était pas basée sur le pétrole», dit M. Kramer.

Comme les fonds souverains ne dévoilent pas leur stratégie d'investissement, certains observateurs du monde financier craignent qu'ils obéissent à un agenda caché.

«Au cours des 18 derniers mois, les fonds souverains ont investi les deux tiers de leur argent dans le secteur financier et le denier tiers dans l'énergie. Pourquoi les finances et l'énergie? Ça me frappe. En tout cas, ce n'est pas une stratégie d'investissement très diversifiée», dit le gestionnaire français Antoine de Salins.

Pas de politique

Appelé à trancher le débat, l'ancien PDG de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Henri-Paul Rousseau, a pris la défense des fonds souverains.

«The big picture, c'est qu'il y a un transfert de richesse et les fonds souverains sont un instrument de transfert de richesse, dit-il. Vous avez une mosaïque de différents fonds, mais ils ont des points en commun. Ils veulent tous aller chercher des rendements à l'extérieur de leur économie afin de ne pas créer d'inflation chez eux. La meilleure approche avec ces fonds, c'est de faire des affaires, pas de la politique.»